Entre la préservation des acquis sociaux et le non-recours à l'endettement extérieur, les mécanismes de financement de l'économie nationale sont difficiles à trouver. L'économie algérienne est confrontée à l'enjeu d'assurer ses équilibres financiers et de diversifier ses sources de revenu, largement dominées par les recettes d'exportation des hydrocarbures dans un contexte marqué par la baisse des prix du pétrole. En réitérant l'option de l'Etat social et la préservation de la politique publique de justice sociale et de solidarité nationale, le Premier ministre Ahmed Ouyahia semble tergiverser, comme ses prédécesseurs, sur le très lourd dossier des subventions, ajoutant ainsi une inconnue à l'équation du financement de l'économie nationale. Toute la question, au vu de ces annonces, est de savoir quelles seront les voies que choisira le gouvernement Ouyahia pour rester fidèle à cette option de l'Etat. Depuis le début de l'année 2015 et l'effondrement des recettes pétrolières, les pouvoirs publics ont multiplié les mesures sans grande réussite. Les appels du pied pour collecter l'argent thésaurisé et disponible sur le marché informel n'ont pas produit les résultats escomptés. Les banques publiques ont été invitées en 2016 à participer à l'emprunt obligataire d'Etat en souscrivant la plus grande partie des obligations émises par le Trésor. Un investissement qui leur a coûté, selon différentes sources, plus de 400 milliards de dinars (environ 4 milliards de dollars). Ce qui a asséché les banques. La mise en conformité fiscale volontaire mise en place a généré de piètres résultats en comparaison avec les 4 000 milliards de dinars qui circulent dans l'informel. Les acteurs de l'informel ont tourné le dos à l'emprunt comme ils l'ont fait pour le programme de mise en conformité fiscale. Le partenariat public-privé et les IDE sont autant de solutions au problème, mais cela reste tributaire de l'amélioration du climat des affaires que les différents gouvernements, malgré leur volonté affichée, n'ont pas pu concrétiser. Avec l'exclusion du recours à l'endettement extérieur qui était d'actualité, y a une année, la marge de manœuvre s'est rétrécie. Même si les banques algériennes n'ont pas eu cette année à financer un nouvel emprunt national, le problème, c'est qu'en 2017, les contraintes de financement imposées aux banques publiques notamment qui assurent plus de 90% des crédits à l'économie, demeurent intactes : financement obligatoire de la microentreprise, des investissements de grandes entreprises publiques ou encore des programmes de logements publics dont le niveau n'a pas été remis en cause malgré la crise financière. Les experts estiment que l'abaissement du taux des réserves obligatoires des banques, qui est passé de 8% à 4% depuis mardi 15 août en leur procurant une marge de manœuvre supplémentaire estimée à 4 milliards de dollars, ne constitue de toute évidence pas une mesure suffisante pour solutionner leur besoin de financement. Financement non conventionnel C'est à ce titre que le recours au financement non conventionnel est évoqué pour désigner tous les financements autres que ceux procurés, directement ou indirectement, principalement par les hydrocarbures, mais sans qu'il y ait des explications sur ce que le gouvernement entend par financement non conventionnel. Selon les experts, le financement non conventionnel peut prendre la forme de mesures d'assouplissement de certaines normes de la politique monétaire conventionnelle ou d'injections massives de liquidités dans le système financier dans des circonstances qui les justifient. Le financement non conventionnel est utilisé mais dans une économie de marché structurée ayant un potentiel de création de valeur ajoutée, ce qui n'est pas le cas en Algérie. Reste, enfin, le recours à la planche à billets qui fait partie du financement non conventionnel. C'est un instrument de régulation du marché monétaire et en conséquence du marché financier. D'autres pays développés l'utilisent savamment pour financer leur économie dans certaines phases spécifiques (par exemple en période de déflation, ou de manque de liquidités). En Algérie, une telle option est à haut risque, jugent certains experts. D'abord, l'inflation est à un niveau élevé : plus de 7%. Actionner la planche à billets provoquerait une explosion des prix, avec un risque sur la stabilité sociale. Par ailleurs, cela produirait une dévaluation du dinar, ce qui risque de fortement déstabiliser les entreprises de production qui dépendent fortement des importations de matières premières. Saïd Smati