L'animosité séculaire que se vouent Chinois et Nippons renaît de ses cendres. Les griefs entre les deux parties sont nombreux, à commencer par les intérêts économiques divergents. De l'avis des observateurs des relations sino-japonaises, la Chine s'évertue à aggraver la situation dans le but de discréditer son voisin afin qu'il ne puisse pas devenir membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU dans le cadre de l'élargissement de l'organe exécutif onusien. Plus diplomates, les Japonais n'ont pas hésité à dépêcher leur ministre des Affaires étrangères en terre chinoise dans le but de trouver une issue à cette crise née à la suite de la publication à Tokyo de manuels scolaires traitant de l'histoire entre les deux pays qui a énormément déplu au régime chinois. Le fait que les atrocités qu'auraient commis les forces nipponnes durant l'occupation de la Chine aient été atténuées est à l'origine de la crise. La rivalité historique existant entre les deux peuples est de notoriété publique. Pékin, qui ne peut user de son droit de veto pour empêcher le Japon d'atteindre son objectif, car cela équivaudrait à une véritable déclaration de guerre, cherche un moyen détourné pour y parvenir. Par des manifestations populaires antinippones “spontanées”, les autorités chinoises veulent montrer au monde qu'un pays qui soulève l'ire de près de un milliard et demi de personnes ne mérite pas une place au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies. D'autres analystes estiment que les origines de la crise sont ailleurs et que cette affaire de manuels scolaires n'est qu'un prétexte pour Pékin, car n'admettant pas que Tokyo se hisse au rang de membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Ce nouveau statut renforcerait la position des Japonais sur la scène internationale et rendrait le règlement des différends entre les deux parties encore plus difficiles. L'enjeu de cette bataille en sourdine jusque-là sont le pétrole et le gaz en quantité gigantesque que recèlerait la mer de Chine, objet d'un litige frontalier sino-nippon de longue date. Pour information, devant l'absence de volonté de part et d'autre pour régler ce différend, aucune frontière n'a été délimitée à ce jour en mer de Chine d'où l'impossibilité de les départager sur ce point. Il faut dire que les contentieux sont trop nombreux et complexes entre Pékin et Tokyo, notamment la question de Taïwan avec lequel le Japon entretient des rapports qui sont loin de plaire à la Chine, pour espérer parvenir à une solution radicale rapidement. Néanmoins, il y a lieu de reconnaître aux Japonais le mérite de recourir à la diplomatie pour enclencher un processus de négociation, comme en témoigne le déplacement de Nobutaka Machimura, leur ministre des Affaires étrangères, à Pékin alors que les manifestations antinippones ont atteint leur paroxysme dans diverses contrées chinoises. Le refus officiel des Chinois de présenter des excuses pour les torts causés à leur voisin par cette vague d'hostilité a constitué le point de non retour. A son retour dans la capitale japonaise, Machimura n'a pas exclu de voir les relations entre les deux Etats se dégrader davantage. Il a jugé “possible” que “les relations Japon-Chine, y compris sur le front économique, se dégradent”. K. A.