82% des 4 812 praticiens algériens inscrits à l'Ordre des médecins sont arrivés dans l'Hexagone ces 20 dernières années. Combien de médecins algériens continueront encore à s'exiler en France ? Le Conseil national de l'ordre (français) des médecins (Cnom) vient de rendre publique une étude sur les flux migratoires et les trajectoires professionnelles des praticiens étrangers qui table sur l'augmentation inéluctable des effectifs dans les prochaines années. Dans trois ans, la France devra compter 30 000 médecins formés hors de ses frontières. Sans être précisée, la part des praticiens algériens devra poursuivre sa progression, selon une courbe ascendante qui se dessine au fil du temps (+56% depuis 2007). Plus globalement, le Cnom révèle que le flux concernant les nationaux s'est accentué de manière considérable depuis près d'une vingtaine d'années. 82% des inscriptions au tableau de l'ordre des médecins ont été accomplis depuis 2000, dont 34% depuis 2010. Selon des statistiques arrêtées à janvier 2017, la France compte 26 805 médecins à diplôme étranger européen et extra-européen inscrits au tableau de l'Ordre, dont 4812 à diplôme algérien, soit plus d'un tiers des effectifs globaux. Ce chiffre ne prend pas en compte les médecins en exercice (assistants et associés) dont le cursus est encore en cours de validation et qui sont autrement plus nombreux. Sur le plan démographique, l'étude du Cnom fait ressortir plusieurs singularités. L'âge moyen des médecins à diplôme algérien inscrits au tableau de l'Ordre des médecins est de 54 ans. Cela signifie que la plupart de ceux qui arrivent d'Algérie ne sont pas particulièrement jeunes. Beaucoup étaient déjà en exercice dans leur pays avant de le quitter. Parmi les médecins qui ont choisi la voie de l'expatriation, les femmes sont de plus en plus nombreuses. 32% en 2017 contre 28% dix ans plus tôt. La répartition des praticiens entre les secteurs public et privé a également connu une évolution. Les statistiques révèlent la présence de plus de salariés (78% aujourd'hui contre 64% en 2007) et moins de médecins libéraux (14% contre 20%). 68% des médecins diplômés d'Algérie exercent dans quatre grandes régions françaises : île de France (44%), Auvergne Rhône Alpes (9%), Hauts de France (9%) et Occitanie (6%). Ces grands départements représentent des bassins migratoires où se concentre la communauté algérienne. Dans une France très vieillissante, les médecins algériens ont été contraints de s'adapter à la demande. La gériatrie qui était au 24e rang des spécialités exercées en 2007 a grimpé dans le classement pour occuper la 3e place après la médecine générale et la psychiatrie (45% des effectifs). Viennent ensuite d'autres spécialités comme la radiologie et l'imagerie, l'anesthesie-réanimation, la pédiatrie, la cardiologie, l'ophtalmologie, la pneumologie et la néphrologie. Selon de nombreux témoignages, les choix des médecins algériens se font par défaut. Ils optent souvent pour des spécialités réputées comme pénibles et contraignantes, délaissées par leurs confrères français. Il faut savoir aussi que beaucoup de médecins qui ne sont pas parvenus à faire valider leurs compétences s'orientent par dépit vers le secteur paramédical. Le Syndicat des national des praticiens à diplôme hors Union européenne milite depuis de longues années afin que les démarches soient simplifiées et les délais de reconnaissance des acquis raccourcis. Toutefois, les difficultés n'empêchent pas de nouveaux médecins algériens de tenter la traversée de la Méditerranée. L'étude du Cnom révèle que 23,3% ont été formés par la seule faculté d'Alger. Une véritable saignée ! De Paris : Samia Lokmane-Khelil