La situation monétaire du pays est catastrophique. Des masses importantes de billets sont retirées de la circulation par la thésaurisation dans les bas de laine, et d'autres masses non moins importantes circulent mais dans l'économie informelle qui échappe à tout contrôle, au fisc comme aux banques et même à toutes les études et statistiques monétaires. Le grand chantier des pouvoirs publics est de réintroduire cette masse dans le circuit bancaire. Mais comment faire ? Selon l'expert financier Ferhat Aït Ali, la meilleure solution serait de créer un nouveau dinar, beaucoup plus fort que l'actuel. Par la création de cette nouvelle monnaie, explique-t-il, le gouvernement pourrait drainer l'énorme masse d'argent de l'informel et du coup faire face au manque de ressources financières nées de la chute des prix du pétrole. L'expert plaide ainsi pour une parité du nouveau dinar à 1 dollar pour 3 dinars et un Snmg à 720 dinars. Dans la démarche qu'il préconise, Ferhat Aït Ali évoque une nouvelle grille salariale, pouvant permettre de maintenir un pouvoir d'achat décent aux salariés aux plus bas revenus. Selon lui, il faut une augmentation des bas salaires qui se situent au seuil des 2,5 Snmg. Pour le reste, les salaires restent les mêmes. En somme, c'est une façon de réguler les bas salaires pour préserver le pouvoir d'achat actuel tout en instaurant un coefficient de salaire de 6 afin de juguler les disparités criantes dans les salaires. En effet, les hauts cadres de la nation ainsi que certains hauts cadres de la Fonction publique touchent des salaires dépassant et de loin dix fois le Snmg. Pour financer ces augmentations des bas salaires, l'expert explique qu'il se fera par les excédents qui seront dégagés par la dévaluation. En effet, dans sa démarche, Aït Ali plaide pour une dévaluation massive et immédiate pour, explique-t-il, casser le statu quo. Quant au risque d'inflation que cela pourra provoquer, l'expert explique que c'est la dévaluation progressive qui engendre une inflation monstre. Une dévaluation massive et immédiate, plaide-t-il, dégagera des sommes importantes qu'il faudra injecter mais, précise-t-il, pas dans les mêmes circuits. Pour ce qui est de l'informel, c'est une sorte de fiscalisation forcée à laquelle l'informel sera soumis. Un dinar qui vaut, par exemple, 100 dinars anciens, permettra de remettre dans le circuit financier une grande partie de la masse monétaire en circulation dans le pays. La masse monétaire qui est dans l'informel se doit d'être échangée sinon elle n'aura plus cours. L'expert indique qu'en plus de permettre à l'Etat et aux autorités monétaires de récupérer toute la masse d'argent qui circule en dehors des circuits financiers, la mesure permettra de réduire par trois la conversion en devise de cet argent de l'informel. La question de l'émission d'un nouveau dinar soulevée par l'expert financier Ferhat Aït Ali mérite d'être débattue par des spécialistes pour éclairer et aider à mieux cerner sa pertinence. Un débat d'autant plus nécessaire que d'autres experts ont évoqué la question. La question a même fait irruption au Sénat lors de la présentation du nouveau projet de loi sur la monnaie et le crédit au Conseil de la nation par le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya. En effet, la commission des affaires économiques et financières du Sénat s'est interrogée sur le non-recours du gouvernement à une autre monnaie afin de bancariser l'argent circulant dans l'informel et consolider davantage les ressources bancaires. Saïd Smati