Sauf coup de théâtre, le Premier ministre britannique, Tony Blair, empochera son troisième mandat lors des élections législatives le 5 mai. Malgré une image usée par huit ans de pouvoir et ternie par la guerre en Irak, le candidat du Labour (travailliste, version libérale) devrait coiffer au poteau ses rivaux. Dans une Angleterre “prospère”, du point de vue du libéralisme façonné à coups de larmes dans les années Thatcher, tous les sondages donnent, depuis des mois, son parti gagnant face aux Tories (conservateurs) de Michael Howard et aux libéraux démocrates de Charles Kennedy. Blair est crédité d'une majorité réduite mais confortable à la Chambre des communes où six cent quarante-six députés siègent. S'il est reconduit, Blair, 52 ans le 6 mai, serait le premier travailliste à résider trois fois de suite dans 10 Down Street, la demeure des Premiers ministres. Il a déjà fait savoir qu'il n'en briguerait pas un quatrième ! En dépit des sondages, les travaillistes se gardent bien de crier victoire. La bataille, qui se concentre dans une petite centaine de circonscriptions susceptibles de changer de camp, est plus ouverte qu'en 2001, et Blair se démène pour encourager des électeurs de son camp, qui ne lui pardonnent pas la guerre en Irak, d'aller voter. Cette guerre, à laquelle les Britanniques étaient très largement hostiles, et les raisons fallacieuses invoquées pour la mener aux côtés des Américains, ont laissé des traces. Nombre d'électeurs disent ne plus avoir confiance en Blair, quel que soit le sujet. Une forte abstention mettrait en péril les pronostics le donnant gagnant, ce qui profiterait aux libéraux démocrates de Charles Kennedy, Ecossais, qui, contrairement aux Tories, s'était opposé à la guerre en Irak. Sur le reste, la campagne électorale a montré que les trois partis britanniques ont plutôt des programmes en partage. La campagne n'a, d'ailleurs, pas mobilisé grand monde. Le Labour a mis en avant les statistiques au vert de son bon bilan économique. En outre, Blair s'est fait accompagner durant toute la campagne par son ministre des Finances, Gordon Brown, que des militants travaillistes avaient souhaité voir lui succéder. Blair insiste sur la poursuite de la lente amélioration des services publics : santé et éducation étant les deux sujets qui préoccupent le plus les Britanniques. Le conservateur Michael Howard (63 ans) a essayé de ravir autour de la question de l'émigration, sans succès. Les Tories ne sont pas encore remis de leurs cinglants échecs de 1997, après 18 ans au pouvoir. Alors que la campagne pour le référendum sur la Constitution européenne déchire la France, le thème est absent de la campagne britannique. Blair, qui a promis son propre référendum l'an prochain, a préféré, dans un pays eurosceptique, garder le sujet dans le tiroir. Les Tories n'avaient eux aussi guère envie de ranimer leurs divisions sur le sujet. Quarante-quatre millions d'électeurs sont appelés à voter le 5 mai. D. B.