Parce que la santé mentale est indissociable de l'environnement culturel de l'individu et que le comportement de tout un chacun est conditionné par son background identitaire, la fondation Mahfoudh-Boucebci a choisi d'allier la recherche à la culture. Si le premier volet se traduit par le travail dans le domaine de la psychiatrie, le deuxième trouve son essence dans la revue annuelle de poésie, qu'édite la fondation, sous le titre 12x2, poésie contemporaine des deux rives et dont le deuxième numéro est depuis mercredi disponible dans les librairies. Un numéro par an, soit un poème par mois, c'est peu. Mais ça reste un exploit en raison de l'absence de la poésie dans notre culture éditoriale et surtout pour les publications de qualité. Car la poésie est avant tout une “passion”, souligne le poète Abderrahmane Djelfaoui, concepteur et rédacteur de la revue, tirée à mille exemplaires. Le principe de 12x2 est tout simple, offrir un espace d'expression, de rêve, de divagation et surtout de rencontre aux poètes des deux rives de la Méditerranée. Et si le premier numéro a été consacré aux poètes algériens et français, le numéro 2 regroupe des textes de poètes algériens et belges. “Peut-être que l'attente un peu longue pour ce rendez-vous d'expression vaut-il une chandelle en un hiver qui s'annonce partout d'une rare rigueur ?”, écrit Djalfaoui. Dans ce numéro et en prélude, les poètes rendent un vibrant hommage au poète que fut et que restera Djamel Amrani, duquel on peut lire Enfance plurielle et Mon île tient dans ta main. Si Ouahiba Aboun Adjali nous invite à une halte à Alger avec un poème dédié à cette ville, Ismaïl Abdoun nous entraîne dans un texte significatif à Palma, ville de rêves et de couleurs. Les autres poètes, chacun à sa manière nous entraîne dans un univers qui lui est propre l'amour, l'exil, le bonheur, l'inquiétude avec Mohand Abouda, Younil, El Mehdi Acherchour, Téric Boucebci ou encore Abderrahmane Djelfaoui. De la rive sud d'Algérie, Mohamed El Ouahed rend grâce au Hoggar, Nassera Halou savoure Le bonheur d'exister, Zineb Laoudj sombre dans La folie de Nouara, alors que l'anthropologue Habib Tengour se perd dans La langue de l'autre et Mourad Yelles visite le Paysage de deuil avec Eléphant. 12x2 rend hommage également à la poésie de Jean Sénac dit l'homme soleil. “La Ljubljana étroite et calme entre ses berges de pierres, canal sans une ride, sur lequel d'immémoriales verdures croulent et penchent leur rideau : ce qui, du ciel automnal croule, bleu, dans la chaleur de septembre, loin et propre à la fois”, écrit Eric Brogniet, le poète belge, qui nous invite par le biais d'une poésie dense et imagée à découvrir l'automne à Ljubljana. Cette rencontre poétique nous fait découvrir Marc Dugardin, Rose-Marie François, Gaspard Hons, Philippe Matty, Yves Namur, Carl Norac, Lucien Noullez, Jacques Orban, Marie-Clotilde Roose, Pierre-Yves Soucy et Liliane Wouters. Une essence de mots et de fragments libres, transparents et ouverts sur diverses émotions. Une poésie à découvrir absolument. 12x2 cultive la mémoire et ouvre une parenthèse sur le séisme d'Alger, dans Après le séisme, “Les petits oiseaux n'auront plus Tant de fenêtre cuisines Venir becqueter et pépier Le soleil lui-même oubliera Peu à peu les rouges et bleus des serviettes Et les linges en familles pendus Peut-être alors neufs muezzins Monteront en autres minarets Rénover l'absence de prières”, écrit Djelfaoui dans Quand la terre tremble, mai 2003), qui avec Yves Broussard, Gérard Engelbach, Brigitte Gyr, Jacques Lovichi, Bernard Mazo, Andréa Moorhead, Jean Claude Tardif, Jean-Max, Tixier, Jean- Claude Villain et Jean Caude Xuereb, glorifient Alger, “la ville vouée”. 12x2, Poésie contemporaine de deux rives Numéro 2, disponible à 250 DA.