Le mouvement de protestation engagé depuis la rentrée universitaire par les étudiants de l'Ecole normale supérieure (ENS) de Constantine, confinée jusque-là dans l'enceinte même de l'Université 3 et l'annexe située au quartier El-Mansoura, a pris, hier, une dimension autrement plus importante puisque les contestataires sont parvenus à investir la rue par milliers, et ce, à la grande surprise des services de sécurité. Pour ce faire, les étudiants ont, vraisemblablement, minutieusement préparé leur coup après la tentative de marche avortée par les renforts des brigades antiémeutes de la Gendarmerie nationale qui, il y a quelques jours, ont empêché la procession des étudiants à l'extérieur de l'école. Hier, ils ont plutôt misé sur l'effet surprise en arrivant par vague de tous les côtés et au même moment, place de la Pyramide, un carrefour névralgique du centre-ville de Constantine. Très vite, un imposant rassemblement de plus de 2 000 étudiants s'est constitué suscitant l'étonnement des passants, mais surtout l'affolement des services de l'ordre pris de court, sachant que le siège de la sûreté de wilaya et le cabinet du wali ne sont qu'à quelques dizaines de mètres. Un arrêt quasi total de la circulation automobile est aussitôt constaté au centre-ville au moment où les protestataires s'attelaient à resserrer les rangs des étudiants qui continuaient d'affluer. Une fois constituée, la marée humaine, fortement quadrillée par des policiers, s'est ébranlée, pacifiquement, en direction de la place du 1er-Novembre, via l'avenue Abane-Ramdane. Les manifestants ont observé une halte devant le palais de la culture Mohamed-Laïd-El-Khalifa avant d'emprunter le pont de Sidi Rached pour marcher sur près de 4 kilomètres pour rejoindre le siège de l'ENS situé au quartier d'El-Mansoura où des centaines de leurs camarades qui observaient un sit-in les attendaient. Dénonçant le mépris de la tutelle à leur égard et scandant des slogans appelant au respect de la dignité des étudiants et non moins futurs enseignants qu'ils sont, les marcheurs ont fait preuve de maturité en échangeant cordialement avec les policiers qui encadraient la marche, lesquels n'ont usé d'aucune intimidation à l'endroit des manifestants qui ont terminé leur démonstration sans heurts ni incidents. Entrés en grève cyclique depuis le début de l'année universitaire en septembre dernier, les étudiants de l'ENS exigent du ministère de l'Education nationale, le respect du contrat d'engagement liant ce dernier aux diplômés de l'école, notamment son article 4 qui stipule leur recrutement dans les wilayas de leur résidence, dès la fin de leur cursus. Aussi, portent-ils la revendication de l'application stricte et réelle des articles 56 et 71 du décret exécutif 315-08 du 11 octobre 2008 portant statut particulier des fonctionnaires appartenant aux corps spécifiques de l'éducation nationale. Articles qui donnent la priorité du recrutement aux sortants de l'ENS aux postes de professeurs de l'enseignement moyen ou de l'enseignement secondaire selon le cycle de formation. Kamel Ghimouze