Des milliers — quelque 40 000, selon les organisateurs — d'anciens contractuels de l'Armée nationale populaire (ANP), issus de différentes régions du pays, ont tenté de rejoindre, hier, Alger, pour y organiser une marche pacifique. Ils ont répondu à l'appel de la Coordination nationale des retraités, des invalides et des radiés de l'ANP représentant quelque 500 000 militaires à la retraite. Il s'agit de militaires ayant servi notamment dans la lutte antiterroriste durant les années 1990. Leur revendication immédiate est la libération de leurs collègues, les premiers délégués nationaux de la coordination, en l'occurrence Aziz Saïdi de Tipasa et Amar Hassini dit "Al-Biri" de Khenchela, tous deux arrêtés à l'occasion de la toute première marche organisé, en juin 2017, et, depuis, détenus, même sans êtres jugés, à la prison militaire de Blida. Des arrestations pour le moins spectaculaires, assimilées à un "kidnapping", en ce sens que les deux infortunés ont été interpellés, séparément, dans des lieux publics, et bien après la marche, violemment réprimée, à laquelle ils avaient participé. Hier encore, apprend-on des organisateurs, au moins une cinquantaine de manifestants, dont l'actuel coordinateur national des retraités, Merouane Bissaf, ancien capitaine de l'ANP, ont été arrêtés puis relâchés. K. M., représentant de la coordination dans la commune d'Aïn Defla, ayant pris part à la marche d'hier, dénonce, en outre, la "violence inouïe" par laquelle sont à chaque fois accueillies les actions pacifiques des anciens militaires. Ces derniers, rappelle-t-il, ne réclament pas plus que leurs droits socio-professionnels. Depuis la première marche de Sétif, faut-il rappeler, les militaires retraités avaient organisé successivement plusieurs rassemblements devant les secteurs militaires de différentes wilayas. Le dernier rassemblement en date remonte au 10 août 2017, alors qu'ils avaient organisé, le 21 mai de la même année, une grande marche, non moins réprimée, de Boumerdès vers Alger. Les revendications de fond de la Coordination nationale des retraités, des invalides et des radiés de l'ANP sont relatives, entre autres, à la révision à la hausse de leur pension de retraite, la revalorisation des primes de blessures, l'accès à des droits sociaux, tels que le logement, une meilleure prise en charge médicale des éléments victimes de la tragédie des années 1990, ou encore l'instauration d'une pension décente au profit des veuves des éléments ayant payé de leur vie la lutte contre le terrorisme. Si ces revendications sont quasiment toutes citées dans la charte pour la paix et la réconciliation adoptée depuis 2006, elles sont, en effet, loin d'être appliquées sur cette frange de militaires ayant pour certains payé de leur chair la lutte contre le terrorisme. Mieux, la même charte aura, bizarrement, profité à bien des terroristes qu'ils ont combattus durant la décennie noire ! Voilà qui révolte davantage les anciens contractuels de l'ANP qui ne comptent pas faire machine arrière avant la satisfaction de leurs revendications. En bons militaires, ils savent que perdre une bataille, fût-elle celle d'Alger, ne signifie pas perdre la guerre. Farid Abdeladim