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2019 : quels lièvres pour Bouteflika ?
si le chef de l'état devait se représenter
Publié dans Liberté le 14 - 03 - 2018

Reconduire Bouteflika dans les conditions de 1999, avec le manque d'alacrité en plus, serait faire le choix de la fragilité institutionnelle périlleuse... le choix du pire.
La candidature de Bouteflika pour un 5e mandat d'affilée se précise au fil des semaines, suggérée surtout par des voix amies qui, campant le rôle d'hérauts, viennent, épisodiquement, renseigner et rassurer l'opinion sur l'état de santé du chef de l'Etat. Cette candidature, si elle advenait, ne serait pas ordinaire, encore moins normale, même si, jaugée à la norme qui a prévalu en 2014 au moment de la validation médicale et politique du 4e mandat, elle pourrait le paraître. Aussi, elle ne devrait pas laisser indifférente l'opposition, partis et personnalités politiques. Devant forcément se déterminer par rapport à l'élection présidentielle, lorsque se rapprochera l'échéance, cette dernière surprendra-t-elle par une position commune forte, dans le cas où Bouteflika s'alignerait de nouveau dans la course à la magistrature suprême ? Si l'on sait avec quasi-certitude que l'idée d'une candidature commune de l'opposition, criée à la cantonade, il faut le dire, par Jil Jadid de Soufiane Djilali, il y a quelques semaines, n'a pas été accueillie avec enthousiasme, il n'en demeure pas moins que d'autres ripostes solidaires pourraient être envisagées. Il s'agit, pour être plus clair et plus précis, de l'éventualité d'un boycott collectif de l'élection présidentielle si Bouteflika postule à se maintenir à la tête de l'Etat. Le consensus le plus large autour de cette option devrait normalement être facile à réunir. D'autant que les annales politiques algériennes retiennent un antécédent similaire, survenu lors de l'élection présidentielle de 1999, lorsque six candidats, Hocine Aït Ahmed, Mouloud Hamrouche, Mokdad Sifi, Ahmed Taleb Ibrahimi, Youcef Khatib et Abdallah Djaballah, s'étaient retirés de la course, la veille du scrutin, laissant le candidat Bouteflika sans concurrents. Le candidat Bouteflika a gagné son premier mandat présidentiel sans combattre. Une victoire sans saveur politique dont il se préoccupa tout le long du quinquennat. Le retrait des six autres candidats l'a si terriblement décontenancé qu'il mettra à contribution toute la machine manœuvrière du DRS pour s'éviter un autre camouflet électoral en 2004. Les assertions itératives autour du 5e mandat ne devraient-elles pas inciter à des anticipations de la part de l'opposition ? Elle doit s'y obliger, si elle tient à ne pas trahir un des engagements de "Mazafran", celui qui consiste à réclamer l'instauration des conditions garantissant des élections démocratiques et transparentes. Et, de l'avis de nombre d'analystes politiques, la satisfaction d'une telle demande passe, le pouvoir étant ce qu'il est, autiste, c'est le moins qu'on puisse dire, nécessairement, pour ne pas dire forcément, par une initiative politique audacieuse. Et la plus indiquée confine évidemment en un refus de cautionner la pérennité à la présidence de la République d'un Président malade, qui ne se déplace plus ni dans les wilayas ni à l'étranger, qui ne s'adresse pas directement à son peuple, comme le recommande la loi fondamentale du pays et qui n'est point assidu dans la réunion des Conseils des ministres. Un refus qui, en la circonstance, passe par le boycott des joutes de 2019. Car, une participation, qui peut servir les rodages partisans et dynamiser les campagnes d'adhésion de militants, sera indubitablement une caution au processus électoral et, partant, une crédibilisation de l'élu qui, dans les conditions électorales actuelles, ne peut-être que le Président sortant. En effet, le scénario d'un Bouteflika recalé dans la compétition électorale est peu concevable. Dit autrement, une participation à la course à la présidence où Bouteflika est candidat, c'est accepter de faire le lièvre. En revanche, ne pas y aller, c'est pour le moins embarrasser le système et le pouvoir qu'il incarne. Reconduire Bouteflika dans les conditions de 1999, avec le manque d'alacrité en plus, serait faire le choix de la fragilité institutionnelle périlleuse... le choix du pire. Ce serait aussi perdre la face aux yeux du monde. Pour le moins.
Sofiane Aït Iflis


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