Sammy Oussedik, coordinateur du mouvement Ibtykar, a brossé, à Oran, un tableau noir de la situation politique, économique et sociale de l'Algérie, conséquence, selon lui, d'une gouvernance basée sur la rente "qui a évacué les trois notions de travail, de gestion et de temps". "La société a désappris à travailler, les problèmes sont gérés par l'argent" et l'Algérie est restée en marge "d'un monde qui bouge et qui évolue", a, en substance, expliqué le conférencier en donnant l'exemple de l'Accord d'association signé avec l'UE en 2002 et qui n'a pas encore abouti en raison de la gestion par la rente. "Nous disposions de 15 ans pour remettre notre économie à niveau, mais nous n'avons rien fait pour changer les choses parce que la rente a aboli le temps." Sammy Oussedik qui considère que l'économie nationale est délabrée (elle est composée uniquement d'un secteur extractif de gaz et de pétrole et 97% de TPE), a déploré que l'Algérie n'ait pas posé les bases de la diversification et des réformes du secteur économique lorsqu'elle en avait les moyens, ce qui va compliquer la tâche aujourd'hui que les ressources se sont taries. L'orateur a, également, regretté que la société algérienne ait perdu une partie de ses valeurs et repères pour devenir une "société d'individualisme de masse", chaque individu étant seulement préoccupé par lui-même. "C'est l'inverse d'une société et il va falloir reconquérir les valeurs qui faisaient notre force", a-t-il affirmé en soutenant que le fossé qui sépare les jeunes de la classe politique classique combiné au silence des acteurs de la société civile peuvent conduire "à n'importe quel aventurisme". "Notre Etat, notre société, notre nation sont menacés", a averti Sammy Oussedik en indiquant que ce sont ces "maux" et d'autres encore qui l'ont poussé à réfléchir à la création d'Ibtykar, mouvement citoyen, collaboratif, participatif et transgénérationnel dont le rôle ambitionne de rassembler les forces démocratiques — quelle que soit leur couleur pourvu qu'elles respectent les valeurs démocratiques — notamment pour "établir un rapport de force favorable face à la matrice (système finissant, ndlr) et, de façon plus générale, face aux tenants de l'immobilisme". Né "officiellement" en décembre 2017 d'une réflexion qui a commencé trois ans plus tôt, Ibtykar s'appuie, essentiellement, sur les plateformes digitales pour véhiculer ses idées et élargir son réseau. "86% des Algériens âgés entre 15 et 35 ans passent en moyenne quatre heures sur Internet et, chaque mois, enregistre l'arrivée de 16% de nouveaux internautes", a énuméré M. Oussedik pour expliquer le choix du numérique. Trois applications, Mouatanatech (l'Observatoire), Barlamini (le Parlementaire) et Chabaka (le Réseau) sont mises à la disposition des Algériens à trois fins différentes. L'Observatoire est dédié à la surveillance de l'évolution des chantiers en construction, le Parlementaire portera la voix des préoccupations des citoyens et leurs aspirations et le Réseau mettra en relation les initiateurs de projets démocratiques. Sammy Oussedik — qui s'exprimait au siège de l'association Bel-Horizon, aux côtés de Samia Seghir, responsable d'Ibtykar Alger, et Yacine Kheddaoui, représentant du mouvement à Oran — a assuré que le mouvement est inclusif et ouvert à tous les citoyens, aux associations et aux partis politiques qui œuvrent à la construction d'un Etat de droit, une République démocratique, pluraliste, sociale et ouverte sur le monde. S. Ould Ali