Le directeur de l'Entreprise portuaire de Béjaïa, Djelloul Achour, s'arroge, vraisemblablement, des prérogatives que sa fonction ne lui octroie pas. Après s'être fourvoyé, dimanche, dans une déclaration au journal électronique TSA, lundi, il a récidivé sur le même support pour douter, à tort, de la véracité du livret foncier publié par Cevital en guise de preuve irréfutable qu'il dispose bel et bien d'un terrain d'assiette à vocation industrielle et commerciale, contrairement à ses allégations. Le P-DG du port de Béjaïa, dont les missions se limitent pourtant au contrôle des navires et de leurs cargaisons, persiste à mettre en avant des arguments, pour le moins fallacieux, pour tenter de justifier le blocage des équipements du groupe Cevital, destinés au montage de son usine de trituration de graines oléagineuses. "L'acte ou le livret foncier exhibé, qui n'indique en rien qu'il s'agit d'une propriété de Cevital, à lui seul, ne permet pas de démontrer que cette assiette est susceptible d'accueillir un tel projet", a-t-il prétendu. Là, il est incontestable que le directeur de l'EPB déborde exagérément de son domaine de compétence. La preuve est dans la réglementation elle-même. Il n'est en effet nullement mentionné dans le décret exécutif n°2002-01 du 6 janvier 2002, fixant le règlement général d'exploitation et de sécurité des ports qu'il faut présenter aux autorités portuaires un "livret foncier" ou tout autre document de même nature pour décharger une marchandise, à plus forte raison lorsqu'il s'agit d'équipements devant servir à un projet industriel, en l'espèce, le montage d'une usine de trituration de graines oléagineuses. L'article 73 dudit décret stipule que les informations à communiquer à l'autorité portuaire se limitent au "nom du navire, ses caractéristiques principales, son pavillon, la date et l'heure d'arrivée, ainsi que la durée prévisible de l'escale". Rien de plus. En clair, l'autorité portuaire n'a pas vocation, ni l'habilitation d'ailleurs à demander des informations sur l'endroit ou les conditions de l'entreposage de la marchandise une fois sortie de l'enceinte portuaire. Mais Djelloul Achour, qui ne doit certainement pas ignorer les textes réglementaires — Cevital les lui a rappelés dans plusieurs courriers, depuis plus d'un an —, s'arroge tout de même un droit de regard sur ce qui ne le concerne pas. Il va encore plus loin dans son propos et divague : "Cevital, en qualité de partenaire et d'opérateur économique, devrait savoir que nous sommes dans une République, qui dispose de ses lois et de ses réglements, qu'un tel projet, requiert des autorisations et des habilitations, qu'il se doit de rassembler, pour la réalisation d'un tel projet. Notre démarche s'inscrit dans cette logique citoyenne." À la bonne heure ! Voilà qui montre tout l'arbitraire de la décision du directeur de l'EPB. Si des textes réglementaires disposant que pour décharger une cargaison, son propriétaire doit présenter aux autorités portuaires la nature du projet pour lequel elle est destinée ainsi que les autorisations et les habilitations pour le projet, que M. Djelloul les rende publics. Les dossiers relatifs au montage de projets industriels sont de la compétence des services du ministère de l'Industrie, de leur seule compétence. Jamais d'un directeur de port. Faut-il rappeler au directeur de l'EPB que le projet qu'il bloque en empêchant le déchargement des équipements a été agréé par les autorités publiques et a fait l'objet d'une décision favorable de l'Andi. Djelloul Achour affirme, par ailleurs, qu'il agit ainsi au nom d'une "logique citoyenne". Ainsi donc, à suivre son "raisonnement", la citoyenneté s'accommoderait de la violation de la loi et des règlements en vigueur. Dans un pays où un directeur de port se fait porte-parole de la "République", et quand la République laisse faire, c'est sans doute cela la citoyenneté. Mehdi Mehenni