La constitutionnaliste Fatiha Benabbou a adhéré à l'appel de 14 personnalités qui demandent au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, de ne pas briguer un cinquième mandat. Elle nous livre ses motivations. "J'ai été contactée pour signer l'appel. J'ai d'abord hésité, car il fallait que je m'assure que la liste des signataires ne contient pas les noms d'extrémistes, et que la lettre soit respectueuse, sans insultes et sans violence". Elle affirme que sa décision a été prise par acquis de conscience. "Un 5e mandat n'est pas valable légalement", atteste-t-elle. Elle explique qu'il est faux de croire que la Constitution de 2016 remet les compteurs à zéro en matière de nombre de mandats accomplis. "C'est une révision constitutionnelle, pas une nouvelle Constitution". Elle cite l'article 7 de la loi fondamentale, qui confère le pouvoir constituant au peuple. Alors que les modifications apportées à la Constitution de 2016 ont été adoptées par un organe constitué, le Parlement en l'occurrence. "Je ne pense pas que l'initiative influera sur le cours des événements. Mais devant l'histoire, on n'aura pas cautionné une dérive", poursuit-elle, lucide. Au-delà des aspects règlementaires, Mme Benabbou estime que le président Bouteflika ne peut plus assurer les lourdes charges d'un chef de l'Etat. "Le peuple a besoin d'avoir une relation directe avec le président de la République. Or, cette relation est coupée depuis 2013. Et puis, il n'y a plus personne pour porter l'Algérie au plan international. Même au sein de la Ligue arabe, notre voix est devenue inaudible", souligne notre interlocutrice. L'amorphie au sommet de l'Etat a conduit, de son point de vue, à une situation anomique, c'est-à-dire refus de donner une effectivité aux lois de la République. Elle donne pour exemple la violence exacerbée dans la société. Souhila H.