"J'ai dit à Djilali Soufiane qu'il était hors de question pour moi de militer dans une activité partisane", explique Mme Benabbou qui n'a pas pris part à la dernière réunion du groupe. La constitutionnaliste Fatiha Benabbou a quitté le groupe des signataires de la lettre ouverte adressée le 26 mai dernier au président de la République lui demandant de renoncer à un cinquième mandat. L'universitaire explique le pourquoi du geste et souligne qu'il était prévu dès le départ qu'elle ne s'engagerait pas au-delà de cette première initiative. "J'ai adhéré à cet appel car c'est une prise de position par rapport à l'histoire. Ce que tout intellectuel ou universitaire se doit de faire vis-à-vis de sa conscience et de la société. Mais je ne veux pas faire de la politique. Je souhaite garder ma crédibilité scientifique. C'était clair dès le départ. Je l'ai dit à Djilali Soufiane qu'il était hors de question pour moi de militer dans une activité partisane." Elle n'a pas été de la réunion, la seconde, que les signataires de l'appel au chef de l'Etat, des militants de droits de l'Homme, des universitaires, des intellectuels et des personnalités partisanes et politiques, dont l'ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour, Ali Benouari, ancien ministre du Budget et président de Nida, ainsi que Soufiane Djilali de Djil Djadid, ont organisée il y a quelques jours pour réfléchir à d'autres actions à mener pour contrecarrer une éventuelle candidature de l'actuel chef de l'Etat à la présidentielle de 2019 et "instaurer un Etat de droit et de démocratie". "Mon but était seulement de donner mon avis en tant que juriste et universitaire. C'était très sérieux de ma part de signer ce premier appel à renoncer à un cinquième mandat car c'est un acte anticonstitutionnel", explique encore Mme Benabbou, qui estime que c'est faux de croire que la Constitution de 2016 remet les compteurs à zéro en matière de nombre de mandats accomplis. "Un cinquième mandat n'est pas valable légalement. En 2016, le Président a fermé le verrou des mandats après l'avoir ouvert en 2008. Désormais la Constitution ne parle que de deux mandats pour chaque président. Car il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas eu de nouvelle Constitution en 2016, mais une simple révision, de surcroît, adoptée par un pouvoir constitué, et non par le pouvoir constituant, qui appartient exclusivement au peuple", fait-elle remarquer, soutenant que dans ce cas-là, les articles non amendés continuent de régir les institutions. Elle cite l'article 7 de la loi fondamentale qui confère le pouvoir constituant au peuple. "Beaucoup de gens ont une mauvaise compréhension de cet article 7 qui stipule clairement que le pouvoir appartient au peuple. Le Président propose, le Parlement révise, mais seul le peuple peut faire une nouvelle Constitution", étaye Fatiha Benabbou. Elle ajoute : "On ne peut pas parler d'une nouvelle Constitution quand bien même elle est votée par les deux ou les vingt chambres du Parlement". Au-delà de ces aspects réglementaires, Fatiha Benabbou estime que Bouteflika n'est plus en mesure d'assurer les lourdes charges d'un chef de l'Etat. "Le peuple a besoin d'un contact direct avec le Président. Or, cette relation est coupée depuis 2013. Cette absence devient donc un facteur de risque. Au sein de notre système, le Président est le centre de gravité du pouvoir. Quand il est absent, tout est paralysé, d'autant plus qu'en Algérie, aucun clan du pouvoir n'est en mesure d'assurer l'hégémonie politique", conclut la juriste. Nissa H.