Il y a quelques mois, des pays comme l'Algérie et la Tunisie ont signifié une fin de non-recevoir à sous-traiter ce dossier en contrepartie de financements de l'Union européenne. L'Europe envisagerait, selon le quotidien britannique The Guardian, de remettre sur la table son plan d'implantation de centres d'accueil pour migrants et réfugiés dans les pays d'Afrique du Nord, à la veille d'un sommet crucial à Bruxelles sur le sujet la semaine prochaine. L'idée, déjà rejetée par des pays comme la Tunisie et l'Algérie, serait au cœur d'une nouvelle proposition à l'occasion d'un sommet dont l'objectif est de sauver l'Union européenne de l'éclatement plutôt que de régler une crise humanitaire qui n'a fait que trop durer. Le quotidien britannique s'appuie sur un document préliminaire que le Conseil européen compte soumettre à la discussion lors du sommet prévu pour les 28 et 29 juin. L'UE veut en effet créer des "Plateformes régionales de débarquement" qui devraient permettre, selon le document divulgué, "un traitement rapide pour distinguer les migrants économiques de ceux qui ont besoin d'une protection internationale, et réduire l'incitation à entreprendre des voyages périlleux". En contrepartie, les pays concernés bénéficieront des financements nécessaires pour mener à bien un tel plan, comme l'avaient déjà suggéré les pays membres de l'UE auparavant. Mais d'ores et déjà, l'on sait que l'Algérie et la Tunisie diront non à un tel plan qui constitue un autre facteur d'instabilité de la région nord-africaine et maghrébine tout entière. Quant à la Libye, l'installation de tels centres aggravera la crise migratoire et des réfugiés, déjà difficile à gérer avec l'instabilité politico-sécuritaire que vit ce pays-passoire depuis sept ans. Si la formation par les pays européens des gardes-côtes libyens a fait baisser le nombre de départs vers l'Europe, elle n'a pas mis fin en revanche à l'activité des réseaux de trafic qui ont adapté leurs méthodes et versent dans l'esclavagisme, le recrutement des candidats au terrorisme islamiste ou pour le compte des milices libyennes. L'Union européenne avait déjà usé de cette option en signant en novembre 2015 un accord avec l'Union africaine, lors d'une réunion à Malte. L'accord stipulait le déblocage d'une enveloppe initiale de 1,8 milliard d'euros pour financer des projets de formation et de développement dans les pays pourvoyeurs de migrants, en contrepartie d'une implication des pays africains dans la lutte contre l'immigration clandestine. Mais cette approche n'a rien réglé à la crise qui s'est aggravée durant les mois qui ont suivi. Les ONG humanitaires et de nombreux politiques européens ont dénoncé cette démarche de Bruxelles qui refuse toujours d'aborder le sujet sous son aspect politique, préférant parler de migrants au lieu de réfugiés. L'Algérie a mis en place un plan de lutte contre la migration clandestine et conclu des accords avec les pays voisins. Cela n'est pas le cas de la Libye ou de la Tunisie, dont la fragilité de la situation impactera de manière directe ou indirecte notre pays. Lyès Menacer