Considérée comme la 49e wilaya, qui semble échapper à toute autorité, la résidence d'Etat de Club-des-Pins fait, à nouveau, parler d'elle. Un décret présidentiel, portant 4 articles, remet cette "réserve de la République" sur le devant de la scène. Si l'intitulé du décret est clair, puisqu'il évoque l'incessibilité du patrimoine immobilier de la résidence d'Etat du Sahel, les modalités de son application nourrissent commentaires et fantasmes. Touchera-t-on à ceux qui ont déjà acquis des chalets et des villas situés à Moretti ? "Non", répond un ancien locataire des lieux. "Il y a le principe du droit acquis. Ceux qui ont acquis des villas ou des chalets avant la publication de ce décret ne seront pas touchés", indique Zoubida Assoul, juriste. "En règle générale, les lois et décrets n'ont pas d'effet rétroactif", rappelle l'ancienne juge. Si la chose est entendue sur le plan juridique, il reste à savoir pourquoi la Présidence a pris ce décret ? Des sources au fait du dossier donnent une seule explication. Ce texte vient "corriger" un décret exécutif signé le 6 juin dernier par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Le texte prévoit, en effet, "les conditions et les modalités de cession des biens immobiliers appartenant à l'Etat et des biens gérés par les OPGI". Le décret, publié dans le Journal officiel no 33, est perçu comme une porte ouverte à des cessions des biens de l'Etat. Surtout que dans son article 2, le décret exécutif stipule que "les biens immobiliers (...) sont cédés à leurs occupants légaux, personnes physiques de nationalité algérienne ou morales de droit algérien, sur la base de leur valeur vénale". Il n'y a donc pas de frein à ces ventes qui se font souvent à des prix symboliques. Le décret présidentiel est une nouvelle occasion de présenter le chef de l'Etat dans l'habit de celui qui rappelle à l'ordre. La preuve est que le texte est venu, une nouvelle fois, "corriger" une décision prise par Ouyahia. Mais à ce stade, il est difficile de dire si des tentatives de vendre d'autres biens situés dans la résidence de Club-des-Pins à des particuliers n'ont pas été faites. Car, c'est cela qui justifierait l'intervention présidentielle. Fondée en 1997, la résidence d'Etat de Club-des-Pins est devenue, au fil des ans, un symbole du pouvoir. C'est à l'intérieur de ce lieu que cohabitent des pontes du régime, civils et militaires, de hauts cadres de l'Etat, des journalistes et des responsables de certains médias. Si la plupart des résidents sont locataires, quelques-uns ont pu acheter des villas et des chalets à Moretti qui fait partie du domaine de la résidence d'Etat, à des prix inférieurs à ceux du marché. Depuis quelques mois, le directeur de la résidence de Club-des-Pins, Hamid Melzi, a "expulsé" plusieurs occupants de chalets et de villas, essentiellement ceux qui n'ont pas payé leur loyer. Il s'agit d'anciens cadres de l'Etat et d'autres personnalités. En revanche, de nouveaux résidents, dont des hommes d'affaires, ont réussi à occuper des résidences. La résidence de Club-des-Pins est interdite au commun des Algériens. Elle dispose, outre des résidences, d'une plage réservée aux résidents et à des commerces. C'est dans cette enceinte qu'est également érigé le Palais des nations, qui abritait les grandes rencontres internationales, avant d'être remplacé par le Centre international des conférences, construit à proximité de Club-des-Pins. Ali Boukhlef