Depuis 2014, l'Algérie a vu ses revenus pétroliers fondre comme neige au soleil. Le Fonds de régulation des recettes (FRR), qui lui a permis de tenir face à la baisse brutale des prix du pétrole jusqu'en septembre 2017, s'est, pour sa part, épuisé en septembre 2017. Pour pallier cette situation, le gouvernement a dû recourir au financement interne non conventionnel (planche à billets), compliquant encore plus la situation. Aujourd'hui, l'urgence des réformes structurelles fait l'unanimité. Il s'agit essentiellement de la révision de la fiscalité, l'amélioration du climat des affaires et, surtout, la refonte de la structure des subventions. Mais c'est faire sans le scrutin présidentiel qui avance à grands pas. En effet, à quelques mois de la présidentielle de 2019, le souci majeur n'est pas les réformes économiques, mais plutôt éviter tout grain de sable dans la machine lancée tambour battant pour le cinquième mandat du Président. La paix sociale n'a pas de prix et le gouvernement en Algérie n'hésite pas à mettre le budget de l'Etat sous pression afin d'acheter un semblant de calme sur le front social. En période pré-électorale, il est de tradition que le politique prenne le dessus sur l'économique, et encore plus cette fois-ci, à la veille de cette présidentielle de 2019 qui s'annonce très mouvementée. Il faut dire que certaines réformes, à l'instar de celle des subventions, peuvent exacerber les tensions. La gestion de ce dossier des subventions renseigne, à elle seule, sur les réticences des pouvoirs publics à aller de l'avant en matière de réformes. Pour rappel, des départements ministériels, épaulés par des experts de la Banque mondiale, ont travaillé durant près d'une année sur la refonte de l'action sociale de l'Etat au profit d'un système de transfert monétaire au bénéfice des démunis. Le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, avait même annoncé que le gouvernement pourrait mettre fin aux subventions des prix des carburants à partir de 2019 et autres subventions à partir de 2020. Pourtant, aucune décision concrète n'a été prise pour remédier à la situation. Aucune échéance n'a été fixée pour l'entrée en vigueur d'une nouvelle politique dans ce domaine. Autre élément révélateur des réticences du pouvoir à réformer, l'étroitesse de la marge de manœuvre du gouvernement. Durant cette année, le président Bouteflika est intervenu à plusieurs reprises, en dernière instance, pour remettre en cause des démarches, essentiellement économiques, engagées par le gouvernement. Il s'agit, entre autres, des décisions portant sur le processus de privatisation des entreprises publiques en difficulté, l'attribution des concessions agricoles à des investisseurs étrangers et le relèvement des droits sur les documents biométriques contenues dans le projet de loi de finances complémentaire pour 2018. Partant de là, il est fort peu probable de voir le gouvernement prendre des décisions courageuses dans le domaine économique dans le contexte actuel fait de tractations politiques autour d'un seul sujet : l'élection présidentielle de 2019. D'ailleurs de nombreux observateurs estiment que rien ne sera entrepris avant l'élection présidentielle. À l'évidence, ce statu quo, voulu, fait perdre un temps précieux à notre économie et ne fait que retarder l'échéance puisque ces réformes devront nécessairement se faire. Tôt ou tard. Pourtant, l'Algérie dispose encore, aujourd'hui, des amortisseurs qui lui permettent de lancer ses réformes sans grandes difficultés et sans courir de grands risques. Saïd Smati