La Russie et la Turquie ont réussi à aplanir leurs divergences sur Idleb, en évitant une guerre dans cette province, le dernier bastion des opposants armés soutenus par Ankara, mais aussi des groupes terroristes proches d'Al-Qaïda et de Daech. Le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Teyyip Erdogan sont parvenus lundi soir à un accord politico-militaire sur la province d'Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie. Les deux chefs d'Etat se sont entendus sur la création d'une "zone démilitarisée" le long de la ligne de démarcation entre l'armée syrienne et les groupes armés qui se sont retranchés dans cette province de près de trois millions d'habitants, ont-ils annoncé à l'issue d'un sommet qui a mis à plat leurs désaccords lors du dernier sommet tripartite à Téhéran, le 7 septembre. "Lors de notre rencontre, nous avons examiné en profondeur la situation dans le gouvernorat d'Idleb et nous avons décidé de mettre en place, vers le 15 octobre 2018, le long de la ligne de contact entre les forces gouvernementales et les groupes d'opposition armés, une zone démilitarisée large de 15 à 20 km prévoyant de faire partir de là les groupes radicaux, y compris le Front al-Nosra", a affirmé le dirigeant russe lors d'une conférence de presse conjointe animée juste après la fin des négociations, lundi soir. Le président russe a également évoqué d'autres "arrangements" auxquels les deux chefs d'Etat sont parvenus. Ainsi, vers le 10 octobre, il est prévu de réaliser, à l'initiative d'Erdogan, "le retrait de cette zone des armes lourdes, des chars, des lance-roquettes multiples et des mortiers de tous les groupes d'opposition présents à Idleb". Le contrôle dans la zone démilitarisée sera assuré par les forces turques et par la police militaire russe, a-t-il ajouté, ont rapporté les agences de presse. L'accord sur la création de la zone tampon à Idleb intervient après une série de rencontres et d'intenses négociations menées par les pays garants du processus d'Astana (Russie, Iran et Turquie), ainsi que d'incessants appels lancés par la communauté internationale pour un règlement politique de la situation dans cette province afin d'éviter une crise humanitaire en cas d'une offensive de l'armée syrienne contre les groupes armés présents dans cette province. Juste après l'annonce de cet accord, l'Organisation des Nations unies (ONU) a appelé les parties en conflit en Syrie à le respecter. "L'accord entre la Turquie et la Russie est considéré comme une nouvelle lueur d'espoir pour des millions de civils qui habitent à Idleb", a écrit lundi sur son compte Twitter officiel le conseiller de l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie, Jan Egeland. Selon l'ONU, une offensive contre cette province pourrait faire jusqu'à 800 000 déplacés et provoquer une catastrophe humanitaire. Quelque trois millions de personnes, dont la moitié sont des déplacés, vivent aujourd'hui dans cette région. La Commission européenne a demandé, pour sa part, que l'accord garantisse "la protection des vies et des infrastructures civiles, ainsi qu'un accès humanitaire sans entrave et durable". Les autorités syriennes ont salué également mardi l'accord russo-turc, a rapporté l'agence Sana, citant une source du ministère syrien des Affaires étrangères. "La Syrie a accueilli toujours favorablement toute initiative qui permet d'éviter l'effusion de sang des Syriens et participe à restaurer la sécurité", a poursuivi le média syrien. De son côté, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a souligné que "la diplomatie responsable et intensive menée ces dernières semaines a réussi à éviter une guerre à Idleb grâce à la volonté ferme de lutter contre l'extrémisme et le terrorisme". Lyès Menacer/Agences