Le président du parti Talaie El-Houriat considère que l'élection prévue au printemps prochain matérialisera "la divergence entre les tenants de l'immobilisme et de la stagnation et les partisans d'un renouveau national". C'est en des termes très durs que le président du parti Talaie El-Houriat, Ali Benflis, s'est adressé, hier, aux partisans d'un 5e mandat pour Bouteflika, à l'occasion de l'ouverture des travaux de la 6e session ordinaire du comité central de sa formation. M. Benflis n'a pas pris de gants pour descendre en flammes les adeptes de cette option qu'il considère comme une aventure de nature "à exacerber la crise globale qui affecte le pays". Le chef de Talaie El-Houriat a regretté que le paysage politique national "soit encore brumeux" et "invisible", ce qui provoque, selon lui, "ce climat d'incertitude totale". "Il y a une opacité qui empêche une analyse lucide de la situation pour une prise de décision", a-t-il déploré, réaffirmant que la décision de son parti vis-à-vis de l'élection présidentielle "ne peut être prise à la légère" et que "seul le comité central" en décidera "souverainement et démocratiquement". Même s'il reste non convaincu par un 5e mandat pour Bouteflika qu'il dit n'être qu'une "éventualité", Ali Benflis considère que la prochaine échéance présidentielle est importante. Et, de ce fait, "notre pays se trouve à la croisée des chemins", avec, estime-t-il, "d'un côté, l'opportunité historique de l'ouverture d'un dialogue politique inclusif pour une solution consensuelle salutaire de la crise et l'adoption d'une feuille de route pour l'instauration graduelle d'un système démocratique et d'un Etat de droit", et de l'autre, "une reconduction du système politique en place par la confiscation de la volonté populaire qui plongera notre pays dans l'inconnu". Autrement dit, M. Benflis considère que l'élection, prévue au printemps prochain, matérialisera "la divergence entre les tenants de l'immobilisme et de la stagnation, et les partisans d'un renouveau national". Ce sont, selon lui, deux projets pour l'Algérie de 2019 et qui cristallisent "l'antagonisme entre les tenants de la prétendue légitimité du terrain" et "les défenseurs de la légitimité populaire", plaidant, au passage, pour le respect de la légitimité populaire, seule à même "d'asseoir la représentativité et la citoyenneté", "de consacrer la confiance entre gouvernants et gouvernés", et seule à même "de garantir la primauté du droit et la légitimité de la loi". Le bilan des échecs de Bouteflika Face aux appels de plus en plus incessants pour une autre mandature pour Abdelaziz Bouteflika à la magistrature suprême, Ali Benflis, tout en refusant de commenter "ces appels", tente d'opposer à cette option les dégâts et les ratages du régime en place. Ainsi, le président de Talaie El-Houriat a passé au peigne fin ces échecs, sur les plans politique, économique et social pour faire pièce à ceux qui défendent le bilan des 20 ans de règne de Bouteflika comme un tremplin pour assurer ce qu'ils appellent "la continuité". "Les questions économiques connaissent un déclassement sur l'agenda du gouvernement en place, concentré davantage sur le maintien du statu quo politique. Le gouvernement donne l'impression qu'il se contente de gérer les affaires courantes en attendant de passer le gué électoral", a-t-il dit, déplorant le fait que "le gouvernement ne fait rien pour engager l'économie nationale sur la voie de la diversification", si ce n'est, a-t-il ajouté, "la mise en place d'une industrie de montage automobile qui engloutit des milliards de dollars et dont l'extrême faiblesse du taux d'intégration annihile toute retombée bénéfique aussi bien pour l'économie nationale que pour le consommateur lui-même, pour ce qui est du prix des véhicules", dénonçant "la corruption" qui menace "les fondements de l'Etat républicain". M. Benflis est convaincu que pour le pouvoir politique en place, "la seule préoccupation est le maintien du statu quo jusqu'à 2019" quel qu'en soit "le coût économique à court, moyen et long termes, pour le pays". Il a expliqué que le régime table "sur le recours irresponsable à la planche à billets", sur "une hypothétique revalorisation des cours du pétrole" et probablement "un recours forcé à l'endettement extérieur, certainement à des conditions peu favorables, après épuisement des réserves de change". Sur le plan social, l'ancien chef de gouvernement n'a pas également hésité à accabler les tenants de la décision à propos "des conditions de vie de l'Algérien qui se détériorent" et "cette régression sociale vécue au quotidien" qui se mesure "à la fréquence des mouvements sociaux de revendication de droits légitimes et de contestation du déni de droits et d'injustice sociale". "Notre pays enregistre un nombre considérable de conflits sociaux. Certains sont récurrents. D'autres durent dans le temps. Mais ils ont une caractéristique commune, leur caractère pacifique", a-t-il indiqué, dénonçant "le recours, systématique, des autorités publiques à la force et à la violence pour réprimer toute velléité de contestation citoyenne et de revendication pacifiques de droits légitimes". "Le dialogue, la concertation, l'écoute de l'autre et la négociation ne figurent pas dans le répertoire des moyens de règlement des conflits sociaux", a-t-il résumé la réaction des pouvoirs publics face à la contestation sociale. Mohamed Mouloudj