Le secrétaire général du Front de libération nationale (FLN) jette l'éponge et rentre chez lui, renvoyé de manière brutale, comme cela se passe souvent pour les cadres du parti quand sonne l'heure de leur déchéance politique. Djamel Ould Abbes, congédié sans préavis, ne s'attendait certainement pas à cette décapante infortune, lui qui venait à peine de sortir d'une empoignade victorieuse avec le désormais ex-président de l'APN, Saïd Bouhadja. Deux répudiations politiques violentes en un court laps de temps, c'est incontestablement le signe d'une agitation profonde qui secoue le parti qui se présentait comme le régent du processus électoral devant aboutir au maintien de Bouteflika au pouvoir au-delà de 2019. Les courants qui font aujourd'hui tanguer le parti FLN sont si forts qu'ils risquent de causer son naufrage. L'enjeu, l'élection présidentielle d'avril prochain, sans nul doute, est de nature à susciter de tels tiraillements. Surtout à partir du moment où, au sommet de l'Etat, la question d'une alternative à la candidature de Bouteflika a été posée de façon sérieuse. En effet, après la visite d'Etat, il n'y a pas si longtemps, d'un haut responsable d'un pays européen, qui a été reçu en audience par le Président, l'option d'une candidature de substitution a été évoquée. La raison ? Des chefs d'Etat européens, venus aux confidences chez le responsable qui a séjourné à Alger, se sont entendu dire que son état de santé ne permet pas à Bouteflika de prolonger son bail. Le "compte rendu" a mis très mal à l'aise les artisans du 5e mandat. La visite récente du président du Conseil italien devait aider à changer l'opinion européenne vis-à-vis de la candidature de Bouteflika. Or, le responsable italien n'a pas pu voir le chef de l'Etat. Coup raté, donc. Dès lors, l'idée d'adouber un autre candidat est confortée au sein du système. L'élection présidentielle approchant, il fallait faire vite. Premier acte : passage en revue des potentiels candidats qui auraient à la fois l'assentiment de Bouteflika et réunir le consensus parmi les partis et organisations qui se sont déclarés favorables au 5e mandat. Parmi les profils qui ont été cités se trouve celui du Premier ministre, Ahmed Ouyahia. L'homme est un commis de l'Etat, rompu à l'exercice du pouvoir, et jouit aussi de la confiance de Bouteflika qui a fait appel à lui après le renvoi d'Abdelmadjid Tebboune. Le secrétaire général du FLN, qui a pourtant maintes fois soutenu que le parti aura son candidat en 2019, n'a pas vu d'un mauvais œil une candidature d'Ouyahia à défaut de celle de Bouteflika. Mais ce n'est pas le cas du reste des membres du bureau politique du parti et d'autres centres de décision. Ces derniers ont tout de suite entrepris de disqualifier cette candidature potentielle. Et c'est le ministre de la Justice, Tayeb Louh, qui ouvre les hostilités. Il met à profit une inauguration à Oran pour animer un meeting et décocher des fléchettes à Ouyahia. Une charge surprenante dont il refusera de se repentir. Visiblement décidés à tout faire pour barrer la route à Ouyahia, Louh et ses alliés, dans cette aventure politique, ont entamé une OPA sur le FLN. Une entreprise autant risquée qu'incertaine. Sofiane Aït Iflis