Ce nouveau rendez-vous de la contestation pacifique, que d'aucuns qualifient de "décisif" et de "déterminant", sera une autre réponse aux "serments" du Président candidat, contenus dans une lettre qu'on lui a attribuée. C'est pour demain que le mot d'ordre a été donné afin de réinvestir la rue pour un 3e vendredi successif de protestation contre le 5e mandat et pour le départ du système. Comme les deux précédents, la mobilisation s'annonce encore plus soutenue, mais aussi plus organisée. Tout le pays retient son souffle, d'autant plus que pour la mobilisation de demain, ce sont toutes les citoyennes et tous les citoyens qui sont conviés à converger dans la rue, afin de réitérer leur refus d'un 5e mandat pour Bouteflika et leur rejet du système dans sa globalité. Toutes les catégories de la société (étudiants, lycéens, avocats, chômeurs, travailleurs, jeunes et vieux…) sont donc attendues, demain, pour une autre démonstration de force. Pour une symbolique journée de lutte pour les droits des femmes qu'est le 8 Mars, la manifestation donne toutes les garanties de réussite. La blogosphère algérienne, qui a énergiquement contribué à mobiliser la rue, est submergée d'appels à la marche, mettant essentiellement l'accent sur la nécessité de garder l'esprit et le caractère pacifique de l'action et d'éviter tout dérapage. Ce troisième vendredi, que d'aucuns qualifient de "décisif" et de "déterminant", sera une autre réponse aux "serments" du Président candidat, contenus dans une lettre qu'on lui a attribuée, dans laquelle, il s'était "engagé solennellement" à entreprendre de "profondes réformes", avec, en sus, "une présidentielle anticipée". Une annonce qui n'a pas manqué de faire réagir la rue avec célérité, et ce, par des manifestations nocturnes enregistrées quelque temps après la lecture de la lettre sur les médias publics. Cette missive, qui n'a pas eu l'effet escompté auprès de la classe politique et de la rue, semble n'être qu'un coup d'épée dans l'eau, tant est qu'elle n'a pas eu raison de la mobilisation citoyenne. Contrairement aux attentes des hommes du système, la contestation s'est intensifiée depuis et les manifestations n'ont pas observé de répit. C'est depuis samedi que toutes les villes du pays vivent au rythme des manifestations de rue répétant, comme un leitmotiv, l'exigence du départ du système et le retrait de la candidature de Bouteflika. Les préparatifs de l'action de demain se sont nourris, également, par des torrents d'informations qui affluent sur les réseaux sociaux. Les comptes rendus de la presse internationale et les émissions des chaînes de télévision étrangères, qui ont traité le sujet durant cette semaine, ajoutent de l'ardeur et de l'enthousiasme à une mobilisation pas du tout prête à lâcher du lest. Le retard mis par le chef de l'Etat pour regagner le pays, son "bilan de santé" rendu public par un quotidien helvétique, les réactions de certaines puissances occidentales sur les événements…, tout cela participe à donner confiance et crédit à une rue décidée à maintenir la pression, mais dans le calme et la sérénité. Dans un élan de solidarité et de civisme jamais connus, les actions de rue enregistrées jusque-là attestent de la maturité du soulèvement et de son orientation éminemment citoyenne. Avec les démissions en cascade des organisations du pouvoir, de ses partis, des institutions élues comme l'APN et le Conseil de la nation, la contestation qui gagne la Centrale syndicale, l'ONM et même l'association des anciens du Malg qui dénonce le 5e mandat, l'adhésion de plusieurs personnalités aux actions pacifiques de la rue, la mobilisation sera déterminante et capitale. Il faut noter que face à cette montée en puissance des manifestations pacifiques, le système s'est auto-condamné à un silence qui en dit long sur l'état d'esprit de son personnel. Manœuvrier et manipulateur qu'il est, il s'est résigné fatalement à courber l'échine devant une contestation imprévue, historique et incontestablement politisée. Tous les ingrédients et les apports sont réunis pour faire de la manifestation de demain un jour de liesse et de lutte dans un esprit de solidarité, de discernement et, peut-être, de triomphe. Croisons les doigts ! Mohamed Mouloudj