Des photos transmises par les satellites algériens Sat I et II ont démontré la présence de plaques importantes de produits pétrochimiques tout le long de la côte au large des pôles industriels d'Arzew et de Béthioua, entraînant des effets néfastes sur la faune et la flore marines. En effet, des quantités estimées à plus de 20 000 tonnes de produits pétrochimiques sont déversées illégalement par les pétroliers et les méthaniers étrangers dans les eaux de ces deux ports reliés au complexe pétrochimique d'Arzew. Selon le directeur de l'environnement de la wilaya d'Oran, des opérations de ballastage sont régulièrement effectuées par les pétroliers et les navires étrangers qui s'approvisionnent au terminal d'Arzew. “Avant de procéder au chargement des produits pétrochimiques, les grands pétroliers se débarrassent en toute illégalité de leur restant (cale) de pétrole et autres produits gaziers, occasionnant de ce fait la pollution de nos côtes marines”, a déclaré le directeur de l'environnement. Pourtant interdites par la législation algérienne et le droit maritime international, les opérations de ballastage ont fini par entraîner dans leur sillage des catastrophes écologiques perceptibles au niveau des ports de Béthioua, de Mersat El-Hadjadj et d'Arzew. Dans ce contexte, 24 624 tonnes de produits pétrochimiques ont été déversées dans la mer au cours du 1er semestre de l'année en cours, un chiffre qui donne le tournis. “Le plus grand danger auquel est confrontée la daïra d'Arzew réside dans l'accumulation, au fil des années, des produits pétrochimiques qui stagnent dangereusement dans les eaux marines, provoquant la disparition prématurée de plusieurs espèces de poissons”, ajoute notre interlocuteur. Selon un rapport élaboré conjointement par la commission du Centre national des techniques spatiales (CNTS) d'Arzew et la commission anti-pollution marine et atmosphérique relevant du ministère de tutelle, il est fait mention de la présence, dans les ports d'Arzew et de Béthioua, de grandes quantités de métaux lourds comme le mercure, le cuivre, le zinc et le manganèse. Les chiffres recueillis par ces organismes font peur. Sur la base de ces données, la pollution bactériologique présente dans les eaux marines correspond à 8 474 tonnes, soit plus de 10 000 bactéries (coli) dans 100 millilitres. La question qui reste posée est relative au fonctionnement de la future usine de dessalement d'Arzew dont la réception est prévue en septembre prochain. Comment endiguer la pollution marine alors que la présence de produits toxiques comme les streptocoques est édifiante à plus d'un titre ? Dans ce contexte, les observateurs relèvent un cas d'espèce qui pourrait être fatal à la qualité d'eau de mer qui provient d'Arzew. “Nous ne pensons pas qu'il faille amplifier démesurément les choses, mais les statistiques et les analyses en notre possession ne plaident pas en faveur de la future usine de dessalement d'Arzew”, avertit un responsable de la Direction de l'environnement à Oran. Des mesures draconiennes vont être prises dans le cadre d'une commission tripartite composée des directions de wilaya de l'hydraulique, de l'environnement et des ressources en eau. C'est la course contre la montre puisque des solutions de rechange immédiates doivent être trouvées pour éviter le dessalement d'une mauvaise eau maritime polluée. Il s'agit de mettre sur pied une cellule multisectorielle (santé, environnement, communes, météorologie, chercheurs et spécialistes) destinée à combattre le phénomène de la pollution marine qui frappe de plein fouet le littoral d'Arzew et de Béthioua. Dans un autre registre, nous apprenons la formation d'un comité ad hoc chargé de superviser les travaux de ladite commission. Il veillera, notamment à l'élaboration d'une unité de veille ainsi que d'un plan de surveillance des pétroliers étrangers qui enfreignent la loi en matière de pollution marine. Même les côtes au large d'Oran sont infestées de métaux lourds. Un rapport de la commission de l'environnement de la wilaya relève une quantité de métaux lourds estimée à 2 270 tonnes ; un chiffre qui dépasse largement la ligne rouge des composants polluants déversés dans la mer. La sonnette d'alarme est à présent tirée. B. Ghrissi