“Conscient des enjeux et de la volonté des autorités de disloquer cette région en faisant des recrutements exponentiels dans les milieux de la pègre et de la délinquance politique, le FFS va utiliser tous les moyens politiques et pacifiques pour empêcher cette entreprise criminelle.” La messe est dite : au sein de la formation d'Aït Ahmed, on n'est visiblement pas disposé à céder devant la volonté des autorités de recourir à la dissolution des assemblées locales de Kabylie. Une dissolution pour laquelle le dernier Conseil des ministres a approuvé des projets de décrets et des amendements de loi. Affairé en compagnie d'autres responsables à mettre la dernière touche aux préparatifs de la grande réunion des élus prévue jeudi prochain au siège du parti, Karim Tabbou, secrétaire national à l'information et chargé de la communication, rencontré hier, a assuré que son parti “utilisera tous les moyens que lui permet la loi” pour empêcher ce qui est désormais qualifié de “coup de force juridique”. “Il sera question de définir toutes les actions appropriées à mener pour stopper cette machine raciste”, dit-il. Si l'option des marches et des rassemblements semble d'ores et déjà retenue, d'autres actions seront également menées, dont, notamment, la prise de contact avec les chancelleries et les personnalités politiques nationales : “On va les informer sur le piège de la dissolution et le risque de voir la situation s'emballer une nouvelle fois dans la violence.” Une chose demeure cependant certaine : la contestation ne sera pas ponctuelle. “La réunion de ce jeudi est déterminante, et c'est parti pour une protestation permanente”, soutient-il. Cette levée de boucliers de la part du plus vieux parti d'opposition ne tient pas a priori d'un sursaut d'orgueil ; elle exprime une volonté de ne pas se laisser faire face à ce qui est vécu comme un véritable mépris. Et pour cause : la décision des autorités est arbitraire, car, selon le FFS, elle ne repose sur aucun fondement juridique ni politique. D'abord, explique Tabbou, l'amendement qui va être proposé sous forme d'ordonnance sera appelé à être adopté par des députés, notamment ceux de Béjaïa et de Tizi Ouzou, lesquels sont issus d'élections “encore moins démocratiques que les locales”. Ensuite, s'interroge-t-il, le maintien de l'APW de Boumerdès et de Bouira est-il admissible, alors que celles-ci sont amputées d'une représentation territoriale ? Sur un autre plan, que peut bien représenter un sénateur de Boumerdès ou de Bouira qui avait bénéficié des voix des élus issus des communes qu'on veut dissoudre ? Enfin, selon lui, le prétexte de dysfonctionnement et de stabilité politique invoqué par les autorités est irrecevable en ce sens que “dans les APC où le parti est majoritaire, il n'y a aucun dysfonctionnement en dépit du retrait des élus du RND et du FLN”. Quant aux soubassements politiques qui accompagnent la dissolution, Karim Tabbou estime qu'“à travers l'amendement, on remet en cause la décentralisation, outre qu'on bafoue le principe basique de la démocratie en se donnant le droit de faire et de défaire les institutions locales”. “Ce qui est le propre des despotes”, affirme Tabbou. “Mais il est clair que le chef de l'Etat veut terrasser politiquement la Kabylie pour régler des comptes à la wilaya III et démanteler les forces politiques”. “Et le ciblage du FFS, ajoute-t-il, sous le couvert d'un bricolage juridique, montre l'incapacité, voire l'allergie de voir se développer des opinions libres et des forces autonomes”. Cela dit, au FFS, on ne pense pas moins que la tenue de ces élections peut s'avérer difficile, manière sans doute de suggérer que la partie ne sera pas aisée pour les autorités. Incontestablement donc, le bras de fer est plus que jamais engagé. KARIM KEBIR