Les députés et les sénateurs ont été officiellement convoqués — comme d'habitude par sms — au congrès du Parlement, programmé pour le mardi 9 avril au Palais des nations. "C'est une pure formalité", a expliqué Lakhdar Benkhelaf qui, par ailleurs, a annoncé que le groupe parlementaire de l'alliance El-Bina-Adala-Ennahda (14 élus) boycottera la plénière si l'intérim, à la présidence de la République, est assuré par Abdelkader Bensalah tel que le stipule l'article 102 de la Constitution. L'enjeu réside justement dans ce détail. La réunion du Parlement avec ses deux Chambres est l'ultime étape avant que le président du Conseil de la nation ne prenne ses fonctions à la tête de l'Etat pendant 90 jours, le temps d'organiser une élection présidentielle. Le peuple rejette, néanmoins — il l'a massivement et clairement exprimé le vendredi 5 avril —, cette option, autant que son alternative énoncée aussi par la loi fondamentale, soit la nomination à ce poste du président du Conseil constitutionnel, Tayeb Belaïz, en cas de démission ou de décès du deuxième personnage de l'Etat. Contourner l'application stricto sensu des dispositions de l'article 102 et tenter par là même d'apaiser la rue supposent la création d'une situation inédite non prévue par la Constitution. Plusieurs scenarii sont envisageables. L'on peut considérer comme solution possible de sortie de l'impasse la démission d'Abdelkader Bensalah du perchoir du Sénat et son remplacement, par le vote des membres de la Chambre haute, d'un autre sénateur. La procédure ne pourrait, toutefois, être accomplie en moins de 48 heures et ne garantit nullement l'adhésion des Algériens. Le renoncement conjoint d'Abdelkader Bensalah et de Tayeb Belaïz à accéder provisoirement à la plus haute fonction dans la hiérarchie de l'Etat induirait un vide institutionnel, qui mettrait systématiquement le pays dans une voie inconstitutionnelle. Les choix politiques s'imposeront alors comme l'unique issue. Encore faut-il qu'ils favorisent une transition efficace et sereine. En termes clairs, il convient de faire écho à la demande des millions de manifestants et de prendre en compte des propositions de partis politiques de l'opposition : constituer une présidence collégiale, former un gouvernement de transition et changer la composante du Conseil constitutionnel, en s'appuyant sur des personnalités crédibles et compétentes, sans antécédents avec le régime en place. Sauf que le soulèvement populaire n'a pas encore de représentants et l'opposition ne s'entend pas, jusqu'alors, sur un leadership. Eu égard aux enjeux capitaux de cette étape, des consensus seront probablement trouvés rapidement. Il n'est, cependant, pas à exclure que le général chef de corps d'armée et vice-ministre de la Défense nationale, Ahmed Gaïd Salah, n'admette aucun écart de la Constitution et dicte la conduite d'une courte phase de transition avec les hommes déjà aux commandes des institutions de l'Etat, quitte à exacerber considérablement la colère de ses concitoyens. Souhila Hammadi