Modérée par Meziani Abdelhakim, la rencontre a été l'occasion de faire un tour d'horizon des œuvres qu'a consacrées Abdelkader Bendamèche aux poètes et artistes que sont sidi Lakhdar Benkhlouf, Mohamed Douibi (dit El-Badji) et Ahcène Larbi Benameur (dit H'sissen). En ce temps où l'espoir de la rue se dilue dans l'illusion d'un lendemain qui déchante, il ne reste plus à l'anonyme lambda que de rabattre ses prétentions dans la fréquentation de refuges de l'intellectualité, où il puise un soupçon de liberté de parole. C'est le cas de la réflexion révélée autour de l'œuvre de Sidi Lakhdar Benkhlouf par Abdelkader Bendamèche qui était l'invité de l'agora du livre de la librairie Mediabook de l'Enag, mardi. Modéré par notre confrère Abdelhakim Meziani, l'orateur a déclaré : "Sidi Lakhdar Benkhlouf était lauréat de l'«amana» (distinction) qui lui a été allouée par le saint Choaïb Abou Madyane El-Andaloussi dit sidi Boumediene (1126-1197) et le cercle des poètes du ch'ïr el-melhoun." Apprécié pour sa rime, l'aède né Lakehal Ben Abdellah Ben Khlouf aurait buriné de son sceau lyrique l'élan littéraire qui a levé le voile de l'obscurantisme sur le XVIe siècle. Pour rappel, "l'enfant unique qu'il était est natif à la fin du XVe siècle sous la qualité du «louangeur du prophète Mohammed QSSSL» et était prénommé «Lakehal» (le noir) par sa maman Koula qui voulait le prémunir ainsi contre l'ombrageux œil de l'envieux, eu égard au vœu de l'envie d'enfantement qu'elle avait ardemment souhaité lors d'un pèlerinage au mausolée du saint sidi M'hamed Lakehal", a déclaré le tribun. Originaire d'une famille de la région de Seguia El-Hamra (Sahara) qui a dressé kheïma au XIVe siècle sur le territoire des Maghraoua dans le Dahra, sidi Lakhdar Benkhlouf avait l'âme d'un nomade. C'est ainsi qu'il erra d'une "zaouïa" (lycée) à une autre de l'Algérie profonde où il a fait ses premiers pas dans l'apprentissage du saint Coran. "Si tant qu'à la fin il s'est hissé au rang d'un saint patron parmi les saints de Mostaganem. Mieux, son recueil d'élégies a été adapté dans les qasidas du terroir qu'interprète de nos jours une pléiade d'artistes-chanteurs de châabi", a ajouté le tribun. Au demeurant, la notoriété du guerrier sidi Lakhdar Benkhlouf est allée crescendo, du fait qu'"il a vécu l'épopée héroïque de la bataille de Mazagran du 26 août 1558 contre les Espagnols. Néanmoins, sidi Lakhdar Benkhlouf décéda à l'âge de 125 ans et 6 mois", a conclu l'orateur. Autre présentation, celle de Mohamed Douibi (1933-2003) dit El-Meqnine Ezzine ou le cri de Mohamed El-Badji si célèbre pour sa qasida Ya bahr ettoufan qui symbolise l'hymne à l'amitié. Originaire d'El-Eulma, El-Badji s'identifie à la posture du Vieil homme et la mer d'Ernest Miller Hemingway (1899-1961). Nationaliste jusqu'au bout du manche de sa guitare, cet ermite de Khouya EI-Baz s'est scellé d'amitié avec la mer eu égard à son idéal d'une Algérie qu'il imaginait si belle et si mélodieuse de l'air du Meqnine Ezzine (mon bel oiseau) qu'il a écrit et composé lors de sa détention dans le couloir de la mort de la prison de Barberousse (Serkadji), a-t-on su du conférencier. Autre évocation, l'air de Attir l'qafs (oiseau en cage), d'Ahcène Larbi Benameur (1929-1959) dit H'sissen, a ému l'auditoire. "Ce Casbadji natif de taddert Tizi Ameur Bou Mahni, dans la commune de Aïn Zaouia, est une perle qui fut découverte par cheikh Missoum qui l'intégra en 1957 à la troupe artistique du FLN à Tunis", a déclaré Abdelkader Bendamèche à l'issue d'un tour d'horizon de ses œuvres consacrées à nos chers disparus.