Pour s'adapter à la nouvelle donne, le Front de libération nationale se choisit une nouvelle direction. Réunis mardi à Staouéli, les membres du comité central de l'ancien parti unique ont élu un nouveau secrétaire général, en la personne de Mohamed Djemaï, député de Tébessa, qui succède ainsi à Djamel Ould Abbes. Le nouveau secrétaire général du FLN n'est pas un inconnu. L'homme, oligarque depuis une dizaine d'années, est l'un des symboles de l'intrusion vulgaire de l'argent en politique. Plusieurs fois président du groupe parlementaire du FLN à l'APN et vice-président de cette Chambre, le propriétaire de la société Starlight (spécialisée dans l'électroménager, la société a changé plusieurs fois de nom) a annoncé la couleur. À peine choisi parmi une dizaine de candidats, Mohamed Djemaï a déclaré sa flamme au nouveau pouvoir. Il se met désormais au service de la feuille de route tracée par le chef de l'armée, Ahmed Gaïd Salah. Sa première mission ? Le nouveau responsable du vieux parti explique qu'il s'attellera à "désigner un bureau politique" et à "aider l'armée" dans sa nouvelle mission qui est de "sortir le pays de la crise". Symbole de l'utilisation de l'argent sale dans les structures du FLN, en compagnie de son homologue Baha-Eddine Tliba, Mohamed Djemaï a promis d'assainir le FLN. Pour ceux qui l'accusent d'avoir utilisé l'argent à des fins politiques, l'homme a tout nié en bloc, estimant qu'il "dira la vérité très prochainement". Puis, il promet d'assainir le "FLN de ceux qui ont terni son image". De qui parle-t-il ? "De ceux qui ont utilisé des pratiques contraires aux valeurs du FLN." L'homme a fait partie de ceux qui ont fait du zèle dans la défense d'Abdelaziz Bouteflika. À plusieurs reprises, il a loué "les réalisations" de l'homme et estimé qu'Abdelaziz Bouteflika était "indispensable" au pays. Autres temps, autres mœurs. Le nouveau chef du FLN ne nie rien de son passé. Mais s'il loue "le mouvement populaire", il dénonce ceux "qui ont crié : FLN dégage" qu'il croit trouver parmi "les ennemis de l'Algérie" qui "veulent détourner ce mouvement". Il rejoint ainsi le discours du chef de l'ANP qui accuse ceux qui rejettent les propositions du pouvoir de ne pas "aimer l'Algérie". Il n'y a donc rien qui puisse être reproché au FLN, ni à ceux qui ont géré le pays ces dernières années. En plus de cette posture inspirée par le chef de l'armée, la désignation d'un nouveau SG du FLN (avec l'accord de l'administration) est la preuve que cette formation, qui se targue d'être la première force politique du pays, a été gérée de manière illégale depuis plusieurs mois. Mouad Bouchareb, qui vient ainsi d'être descendu de son piédestal, a été désigné coordinateur du FLN de manière illégale, par le biais d'un coup de force. Sera-t-il jugé ? Lui demandera-t-on des comptes ? On est, peut-être, loin de ces questions, mais cette nouvelle donne laisse poser d'autres questions relatives notamment au maintien de Bouchareb comme président de l'APN. Sa désignation à la tête du FLN a été autant contestée que son parachutage à la tête de l'institution parlementaire, intervenue après un coup de force téléguidé depuis la présidence de la République. Dans les deux cas, le "coupable" est très probablement Saïd Bouteflika. En attendant de régler ces questions, une chose est désormais acquise : le FLN se met, corps et âme, au service du nouveau pouvoir. Tel a toujours été son rôle depuis l'indépendance.