Les manifestants ont rejeté les velléités de "sissification" de l'Algérie. Hier, pour le deuxième vendredi de jeûne, le chef d'état-major, Ahmed Gaïd Salah, a cristallisé l'essentiel du ressentiment des Oranais qui ne lui pardonnent pas son attachement à la tenue de l'élection présidentielle du 4 juillet. "Il n'y aura pas d'élection… Allez voter seul… Nous refusons des élections supervisées par el-issaba…", ont été quelques-uns des slogans scandés par les Oranais qui sont descendus dans la rue pour ce 13e vendredi de contestation. Beaucoup d'entre eux ont également accusé Ahmed Gaïd Salah d'être à la tête de ladite bande dont il œuvre à préserver les intérêts. "Leblad bladna et Gaïd khanena" (Le pays est le nôtre, et Gaïd nous a trahis), ont-ils scandé lors de la marche qui les a menés de la place du 1er-Novembre à la place Zabana. Les interpellations de Saïd Bouteflika, des généraux et des hommes d'affaires ? Une comédie qui ne trompe personne : "Gaïd Salah et ceux qui sont derrière ces arrestations médiatiques font également partie du système honni. Il revient à la justice, et à elle seule, d'engager des poursuites judiciaires", ont-ils indiqué. Pour les manifestants, des élections transparentes et régulières sont impossibles avec Bensalah, Bedoui et tous les responsables qui forment le système en place et dont ils continuent d'exiger le départ. "Ces élections sont conçues pour reconduire le même système dans une version remaniée. Or, nous voulons nous débarrasser de l'ADN même du pouvoir qui est à l'origine du malheur des Algériens", a-t-on encore expliqué parmi les manifestants qui rejettent également les velléités d'instaurer un Etat militaire, une "sissification" de l'Algérie. "Le pouvoir doit revenir au civil, le rôle de l'armée et des services de sécurité consiste à protéger la nation". Les marcheurs — parmi lesquels des personnes âgées et des familles qui ont bravé la faim et la soif de ce Ramadhan — se sont ensuite rassemblés place Zabana, pour scander des slogans hostiles au pouvoir et réitérer leurs principales revendications, celles-là mêmes qui ont mis le feu aux poudres de la révolte le 22 février. Entre deux Qassaman chantés à l'unisson, les manifestants ont multiplié les slogans appelant au départ de tous les symboles du système, au retour à la souveraineté populaire et à l'Etat de droit. "Nous en sommes au 13e vendredi, combien de semaines vous faut-il encore pour comprendre ?", pouvait-on lire sur une pancarte brandie par un jeune. Hier, comme lors des précédents vendredis, les Oranais ont réitéré leur détermination à marcher et à manifester autant de semaines qu'il le faudra pour pousser le pouvoir vers la sortie. "Saïmoun, samidoun", ont-ils répété devant les innombrables smartphones qui transmettaient sur les réseaux sociaux ces moments historiques. "Nous n'abandonnerons jamais. Le mouvement s'essouffle, faiblit peut-être, mais il ne s'arrêtera jamais. Pacifique, il continuera jusqu'à ce que l'Algérien recouvre sa liberté et sa dignité", a juré un des manifestants de la première heure en rappelant qu'en 20 ans, "les dirigeants ont dilapidé des milliards, pillé le pays et poussé des milliers de jeunes à l'exil et au suicide". S. Ould Ali