Les enquêteurs égyptiens ne savent plus où donner de la tête, maintenant que les revendications se multiplient et que la piste pakistanaise est écartée. Après la première revendication d'Al-Qaïda, survenue au lendemain des explosions de Charm el Cheikh, celle “des Moudjahidine d'Egypte”, avant-hier, c'était au tour, hier, d'un troisième groupe, inconnu jusque-là, “Le Groupe de l'unicité et du jihad en Egypte”, de revendiquer la sanglante opération. Si le second groupe qui avait assumé la paternité des attentats a exclu tout lien avec Al-Qaïda, il s'affirme comme un appendice de la nébuleuse d'Oussama Ben Laden. Ainsi, il présente son action comme “une vengeance pour nos frères en Irak, en Afghanistan et en réponse à la guerre contre le terrorisme”, et d'ajouter : “C'est aussi en allégeance aux chefs des moudjahidine au sein du réseau Al-Qaïda, cheikh Oussama ben Laden, et cheikh Ayman Al Zawahiri, que Dieu les garde.” Quant à l'enquête, les services de sécurité égyptiens paraissent totalement désorientés, après l'abandon de la piste pakistanaise. Suite à la virulente réaction du général Pervez Musharaf, le président du Pakistan, qui avait exclu tout lien entre les attentats de Charm el Cheikh et son pays, les autorités caïrotes ont changé de fusil d'épaule. Hier, à Islamabad, l'ambassadeur d'Egypte a affirmé qu'aucun Pakistanais n'était impliqué dans les attaques en question. Il a rendu public un communiqué dans lequel il indique avoir “informé le gouvernement pakistanais qu'aucun ressortissant pakistanais n'était impliqué dans les actes terroristes qui ont frappé Charm el Cheikh samedi dernier”. Mieux, le diplomate est allé jusqu'à assurer que “le gouvernement égyptien n'avait à aucun moment accusé des Pakistanais d'être impliqués dans ces attentats”. “Il ne s'agit que d'informations de presse”, a-t-il ajouté. Voilà un revirement pour le moins déroutant, alors que, vingt-quatre heures auparavant, la police égyptienne avait placardé les portraits de six Pakistanais, suspectés d'avoir organisé les attentats. Ces développements vont obliger les services de sécurité égyptiens, qui ont lancé une véritable chasse à l'homme, à revoir leur stratégie. Par ailleurs, les Bédouins de la région de Charm el Cheikh, première cible des enquêteurs, nient toute participation dans les attentats. Sur un autre plan, des experts légistes continuaient leur travail d'identification des corps des victimes, alors qu'une certaine confusion régnait sur le nombre de morts total de ces attaques. En effet, la porte-parole du ministère du Tourisme, Hala al-Khatib, a indiqué que le bilan, encore provisoire, était de 64 morts comptabilisés, alors que jusque-là le bilan donné par le gouverneur du Sinaï du Sud était de 88. Pendant ce temps, la commission électorale annonçait, hier, que les candidats à l'élection présidentielle égyptienne auront une semaine pour se faire enregistrer à partir du 29 juillet. Afin de pouvoir concourir, les candidats devront présenter 250 signatures d'élus nationaux ou locaux et pourront retirer leur candidature après enregistrement, s'il le souhaite, au plus tard le 23 août. Quant à la campagne électorale officielle, elle débutera le 17 août et se terminera le 4 septembre, ajoute le communiqué, soulignant qu'un éventuel deuxième tour aura lieu le 17 septembre. Ceci étant, la majeure partie des partis et d'individus — dont les Frères musulmans, principale force d'opposition, le parti de gauche Tagammou, Kefaya, ainsi que l'activiste féministe Nawal Saâdaoui et le militant des droits de l'Homme Saâd Eddine Ibrahim — ont déjà annoncé qu'ils boycotteraient le scrutin. Seuls deux candidats ont clairement annoncé leur candidature jusqu'à présent. Il s'agit de l'opposant et président du parti Al Ghad, Ayman Nour, et le neveu d'Anouar Sadate, le député Talaât Sadate. K. ABDELKAMEL