Le Conseil militaire de transition, au pouvoir au Soudan, a annoncé mardi l'annulation de tous les accords passés avec l'opposition et l'organisation d'élections dans neuf mois, avant d'appeler hier à des négociations "sans restriction". Le comité des médecins soudanais a annoncé hier que soixante manifestants ont été tués dans la répression de la contestation soudanaise depuis lundi, jour de la dispersion sur ordre du Conseil militaire du sit-in devant le quartier général de l'armée à Khartoum. Des images amateurs filmées durant la dispersion montrent des dizaines de manifestants, essentiellement des jeunes, courant pour fuir les balles tirées de loin. Dans leur course, certains transportent péniblement des blessés. Ceci étant, ce bilan peut augmenter encore, car il n'est que provisoire, selon ce comité de médecins proche de la contestation. La même source accuse les "milices du conseil (militaire) (...) d'être responsables de ce massacre". Les dirigeants de la contestation jugent que les Forces de soutien rapide (RSF) sont les principaux auteurs de la dispersion par la force du sit-in devant le QG de l'armée, lundi. Ils ont appelé à poursuivre la mobilisation et ont rejeté l'appel à des élections par les militaires au pouvoir. "La situation est maintenant pire que jamais", a condamné l'Association des professionnels soudanais (SPA), clé de voûte de la contestation. "Nous appelons tous les Etats et les organisations à isoler et à cesser de traiter avec le soi-disant Conseil militaire", a déclaré la SPA dans un communiqué, dénonçant des "crimes contre l'humanité". Lors d'une conférence de presse, mardi à Londres, le Syndicat des médecins soudanais a accusé les forces de sécurité d'avoir attaqué des hôpitaux dans tout le pays. Des femmes ont été violées à Khartoum, a dénoncé l'organisation, sans préciser d'où elle tirait ses informations. Hier, à l'occasion de la célébration de l'Aïd El-Fitr au Soudan, les manifestants sont sortis dans plusieurs villes du pays, notamment à Khartoum. À Zinjali, située à l'extrême ouest frontalier avec le Tchad, le gouverneur militaire de la ville a été assiégé par les manifestants à la sortie de la prière de l'Aïd. Par ailleurs, l'opération de dispersion de ce rassemblement emblématique de milliers de manifestants, qui réclamaient depuis des semaines le transfert du pouvoir aux civils, a été vivement condamnée à l'étranger, notamment par l'Union africaine, l'ONU, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Après avoir nié dans un premier temps sa responsabilité dans le massacre de lundi, le chef du Conseil militaire de transition, Abdel Fattah al-Burhane, a lu un message hier à la télévision nationale pour annoncer : "Nous ouvrons nos bras aux négociations sans restriction, sinon celle de l'intérêt national, pour fonder un pouvoir légitime qui reflète les aspirations de la révolution des Soudanais."