Partis politiques et société civile, ainsi que des personnalités nationales étaient unanimes, hier, pour dénoncer la teneur du nouveau discours du chef de l'Etat par intérim, Abdelkader Bensalah, qui continue à défier la "révolution portée par des millions d'Algériens" depuis le 22 févier dernier, notamment en prorogeant son propre mandat provisoire sur la base du dernier avis émis par le Conseil constitutionnel. Les déclarations des uns et les commentaires des autres recueillis, hier, font ressortir le rejet total du discours prononcé jeudi par le chef de l'Etat. Parti des travailleurs "Bensalah nargue les millions d'Algériens" "Le contenu du discours à la nation prononcé la veille par le président Bensalah, issu du coup de force de l'article 102 de la Constitution, a un caractère provocateur car il nargue les millions d'Algériennes et d'Algériens qui manifestent de manière continue depuis bientôt 4 mois pour le départ du système et de tous ses symboles. Le président de l'Etat, faisant fi du rejet du régime/système qu'il symbolise par l'écrasante majorité, a réaffirmé qu'il restera à la tête de l'Etat jusqu'à l'organisation d'une nouvelle élection présidentielle. D'ores et déjà, et en ce moment même, les manifestants du 16e vendredi de mobilisation nationale ripostent à ce discours en scandant "Bensalah dégage" et "pas d'élections dans le cadre de ce régime". La révolution portée par des millions et des millions d'Algériennes et d'Algériens, qui exigent clairement le départ du système/régime en place et l'exercice de la souveraineté populaire, rejette les méthodes anti-démocratiques et despotiques qui ont prévalu jusqu'à maintenant. Bensalah appelle les partis et la société civile au dialogue tout en s'attachant à l'organisation de l'élection présidentielle, il invite donc ces derniers à l'accompagner dans une œuvre de sauvetage d'un système/régime anti-démocratique et obsolète. Le peuple mobilisé est en droit de prendre son destin en main en choisissant librement la forme et le contenu des institutions à mettre en place pour jouir de tous ses droits dans tous les domaines politique, économique, social, culturel… C'est pourquoi, le SPBP réitère sa position pour une Assemblée nationale constituante et souveraine à même de permettre à tous les citoyens d'être partie prenante de la naissance de la nouvelle république débarrassée de l'héritage du système actuel." Hakim BELAHCEL,Premier secrétaire du FFS "Le pouvoir cherche à préserver un système stérile et usé" "Statu quo, résistance au changement sont les maîtres-mots du dernier discours de Bensalah. Ceux qui ont imprudemment ou naïvement cru aux bonnes intentions de l'état-major de l'armée ont eu ce soir la confirmation formelle du contraire, c'est une aversion au changement. Il s'agit pour ce pouvoir d'appliquer leur feuille de route, afin de préserver un système stérile et usé au lieu de suivre la voie de la sagesse en répondant positivement aux revendications populaires. J'appelle encore une fois l'état-major de l'armée à la retenue et à la raison. Les solutions politiques sérieuses existent et ne demandent qu'à être prises en compte. Un dispositif répressif impressionnant a été déployé depuis ce matin (hier vendredi matin, ndlr). Une répression aveugle et féroce a été utilisée par les forces de l'ordre. C'est un comportement condamnable et indigne. Malgré ces violations des droits de la personne humaine, le peuple algérien marchera et vaincra. Le FFS restera toujours mobilisé et déterminé à poursuivre son combat aux côtés des Algériennes et des Algériens pour imposer une véritable transition démocratique et l'avènement de la deuxième république." Mohcine Belabbas, président du RCD "Nous assumons nos responsabilités jusqu'au départ de la îssaba" "La situation exceptionnelle que vit le pays nous oblige, nous aussi, à continuer à assumer nos responsabilités de citoyens par une mobilisation permanente et une présence massive dans la rue jusqu'au départ de la îssaba gaâ et l'avènement d'un nouveau système politique."
Soufiane Djilali, président de Jil jadid "Le pouvoir n'a pas encore compris qu'il n'a pas la confiance du peuple" "En fait, le dernier discours de Bensalah n'est autre qu'une répétition officielle des propos du chef d'état-major de l'armée, Ahmed Gaïd Salah. Le chef d'Etat par intérim a repris ce que le vice-ministre de la Défense a déjà annoncé, c'est-à-dire l'ouverture du dialogue. En réalité, il ne s'agit que de mots et de paroles sans gages. Bensalah propose simplement des mots. Alors que le pouvoir en place n'a pas encore daigné définir l'approche du dialogue à lancer avec tous les acteurs du pays, encore moins l'ordre du jour de ce nouveau dialogue. La logique veut d'abord qu'on s'entende sur les préalables de ce dialogue. On ne peut pas aller vers le dialogue sans un minimum de gages. Ce pouvoir parle de dialogue, mais il n'est jamais passé à l'acte. Il n'a pas encore installé la commission qui va piloter ce dialogue, il n'a pas proposé de personnalités qui vont organiser ce dialogue. Parallèlement, le pouvoir continue à faire semblant d'aller vers le dialogue. Ce même pouvoir n'a pas encore compris, semble-t-il, qu'il n'a pas la confiance du peuple, alors que les Algériens rejettent toutes les figures du système politique et réclament le changement profond du régime." Noureddine Benissad, président de la LADDH "Il a déjà fait ses preuves en matière d'échec politique" "Le discours d'Abdelkader Bensalah tenu avant-hier confirme l'échec à répétition de la feuille de route du pouvoir. En fait, toute personne sensée ne peut rejeter l'idée même du principe de dialogue, or, il s'agit aujourd'hui d'un dialogue complètement balisé, donc ce n'est plus un dialogue. On a l'impression que les tenants du pouvoir actuel ne veulent nullement sortir du système autoritaire vers un régime démocratique. Toutes les indications disponibles confirment bien cette thèse. En outre, Abdelkader Bensalah demeure un symbole du système politique rejeté par le peuple. Ce chef de l'Etat intérimaire n'a aucune crédibilité pour diriger le dialogue dont il parle avec insistance. Bensalah a déjà fait ses preuves en matière d'échec politique par le passé. Il a bel et bien échoué dans l'épisode de dialogue national organisé en 1994. Ce même Bensalah n'a pas réussi à inviter et à réunir autour de la même table les représentants des partis satellitaires qui gravitent autour du pouvoir. Le comble dans ces échecs à répétition est le revers qu'il a essuyé dernièrement de ne pouvoir organiser l'élection présidentielle du 4 juillet. La teneur d'un tel discours politique confirme, une nouvelle fois, que la feuille de route élaborée par le pouvoir actuel n'a laissé aucune chance à la période de transition tant réclamée par le peuple qui manifeste dans la rue depuis bientôt quatre mois, alors que cette phase transitoire est inévitable si l'on espère faire sortir le pays de l'impasse qui n'a que trop duré. Cette impasse s'est encore aggravée par le dernier avis émis par le Conseil constitutionnel quant à la prolongation du mandat intérimaire d'Abdelkader Bensalah qui ne devait pas excéder les 90 jours prévus par la loi fondamentale. Qui a sollicité le Conseil constitutionnel pour s'autosaisir du mandat de Bensalah et émettre un avis permettant de poursuivre ses fonctions de chef de l'Etat jusqu'à l'élection d'un nouveau président de la République, alors que la Constitution est claire là-dessus, à savoir que Bensalah doit partir ?" Abdelouahab Fersaoui, président du RAJ "Il est en déphasage total avec les revendications du peuple" "Le discours de Bensalah est un discours dans la continuité du système. Il est vide et sans évolution notoire. Abdelkader Bensalah confirme l'impasse dans laquelle le pouvoir s'est engouffré, en déphasage total avec les revendications des Algériennes et des Algériens qui aspirent à la rupture avec le système et à la transition vers la république démocratique, sociale et civile. La rue va donner sa réponse claire et forte comme d'habitude lors de la marche pacifique de demain. La mobilisation doit se poursuivre."