La cour de Skikda a rendu son verdict hier dans l'affaire du jeune activiste Messaoud Leftissi, poursuivi pour "incitation à attroupement armé". La condamnation a été de 6 mois de prison avec sursis, assortie d'une amende de 100 000 DA. L'activiste de 34 ans n'était pas présent à la barre car il est en détention à la prison d'El-Harrach, depuis le 21 juin dernier. Il a été arrêté et mis sous mandat de dépôt pour avoir porté l'emblème amazigh lors de la manifestation organisée à Alger. Auparavant, le procureur avait requis une peine d'un an de prison ferme et une amende de 200 000 DA. Ses avocats qui ont demandé l'assistance par vidéoconférence, comme cela est couramment pratiqué lorsque les accusés sont détenus hors wilaya, ont essuyé un refus des juges. Dans une déclaration à Liberté, sa sœur Souad a affirmé que son frère n'a pas pu se défendre, ce qui est considéré comme un manquement à un droit élémentaire. Le militantisme de l'activiste Messaoud Leftissi ne date pas du premier vendredi du hirak, puisque, en 2008 déjà, il avait organisé un sit-in contre l'ouverture des mandats pour Bouteflika et un autre sit-in en 2014 contre la loi de finances et vers la fin de 2015, il avait brandi une pancarte où était écrit "Ya îbad Ya îbad, Bouteflika ba3 leblad", une sortie publique qui lui avait valu une première interpellation par la police avant d'être libéré quelques heures plus tard. Avec l'avènement du mouvement pacifique, M. Leftissi, ingénieur d'Etat en automatique, s'est montré l'un des plus actifs dans le mouvement du 22 février, tantôt à Alger où il travaillait, tantôt à Skikda, sa ville natale. Sa première interpellation a eu lieu à Alger, lui valant un licenciement par son employeur une firme algéro-allemande (GIZ), alors qu'il était en période d'essai comme conseiller technique senior en efficacité énergétique. Selon l'entourage de Leftissi, cette éviction est en relation avec son activisme dans le hirak. Il est connu aussi pour son engagement associatif dans l'association écologique Bariq 21 des énergies renouvelables. Il représentera cette association à la COP21 en France, puis à la COP23 en Allemagne. Lors d'une marche à Skikda, il sera pris à partie par des personnes qui voulaient l'agresser, mais il sera soutenu par les manifestants venus à son secours. Nous avons trouvé son père Boukhmis abattu après le verdict, mais il reste toujours fier du parcours de son fils. Il nous déclarera : "Mon fils aime l'Algérie beaucoup plus que ceux qui la gouvernent." Tout en condamnant l'attaque féroce de certains sur les réseaux sociaux : "Nous sommes une famille de révolutionnaires qui compte des chouhada." Il dira aussi que lui représente le passé et son fils l'avenir, mais ils ne peuvent briser l'élan de cette jeunesse avide de liberté et de démocratie. Son père revenait de la Sarl Sarep, à Skikda, où Messaoud a été recruté récemment et qui revendiquait un justificatif pour son absence, car il va recevoir sa première mise en demeure. Messaoud Leftissi est actuellement en détention provisoire à la prison d'El-Harrach suite à son arrestation lors de la manifestation du 21 juin pour "atteinte à l'unité nationale". Il est accusé d'avoir brandi l'emblème amazigh, alors que selon sa sœur, lors de son arrestation, il était attablé dans un café et le drapeau amazigh était dans sa sacoche.