La rue constantinoise ne laisse aucun répit aux tenants du pouvoir. À chacune de leurs manœuvres, elle apporte une réponse. L'ampleur de la mobilisation citoyenne qui a repris de plus belle en ce 26e vendredi successif des marches augure-t-elle une rentrée sociale des plus chaudes ? Tout porte à le croire au regard de la forte démonstration des Constantinois, hier, qui ont bravé, en nombre encore plus important, la chaleur et le poids des journées éprouvantes de l'Aïd el-Adha. Mieux encore, l'épisode caniculaire que connaît la région depuis plusieurs jours, marquée par des incendies et des feux de forêt, n'a pas eu raison de leur détermination de poursuivre le mouvement populaire pour un changement radical du système politique et l'instauration d'une vraie République. 14h30, l'esplanade du palais de la culture Mohamed-el-Aïd-el-Khalifa, devenue l'épicentre du hirak à Constantine, était déjà noire de monde. Les manifestants venus de plus en plus nombreux des quatre coins de la ville, ont réitéré leur attachement aux revendications pour lesquelles le peuple continue de sortir depuis le début du soulèvement populaire du 22 février dernier. Une fois de plus, ils ont réaffirmé leur résolution d'en découdre avec les résidus du règne du clan Bouteflika. Les manifestants, par milliers, qui ont pris part à la marche d'hier, ont, de ce fait, crié, haut et fort, l'exigence du départ du chef de l'Etat actuel et du gouvernement Bedoui, autant que celui de l'actuel chef d'état-major de l'armée, en récusant en bloc le dialogue initié par le pouvoir en vue d'une élection présidentielle, et aussi contre "la solution constitutionnelle" à laquelle appelle Gaïd Salah. Ce dernier, devenu au fil des marches, la cible principale des manifestants, n'a pas été épargné, hier, une fois de plus, par les marcheurs qui l'ont stigmatisé dans leurs slogans, pancartes et banderoles. Visé sans répit, ils lui ont décoché quelques piques telles que "Les Algériens, khawa khawa, Gaïd Salah maâ el-khawana'', "Gaïd Salah dégage", "Dawla madania, machi âaskariya" ou encore "Libérez nos enfants et prenez ceux de Gaïd Salah''. En empruntant l'itinéraire habituel, les marcheurs ont scandé les slogans habituels tels que "Bensalah dégage, Bedoui dégage", "Djazaïr hourra dimocratia", "Makanech hiwarat maâ el-îssabet", "Karim Younès à la poubelle", "Y en a marre des généraux", et ont appelé à "une grève générale, jusqu'à la chute du régime". Le FLN, le RND et d'autres partis politiques en ont aussi pris pour leur grade, les marcheurs ont crié, à ce titre, "FLN, RND, houkouma, barlamane dégage dégage" (FLN, RND, gouvernement et Parlement dégagez). Et des slogans hostiles à la presse acquise au pouvoir, tels que "Sahafa chiyatine" et "Sahafa yarhlou'' ont été longuement entonnés. Selon un employé dans une administration, "le peuple n'est plus dupe, nous ne croyons pas à ce panel, ni au dialogue avec des personnes désignées par le pouvoir. Nous comprenons très bien que le décideur, qui n'est autre que Gaïd Salah, veut, à tout prix, nous conduire vers des élections le plus tôt possible et semble ignorer que le peuple ne veut plus qu'on décide à sa place". Et de poursuivre : "Nous continuerons à sortir chaque vendredi, jusqu'au départ de toutes les figures qui ont mené le pays à cette impasse, et comme vous voyez, le hirak à Constantine reprend son souffle, les gens sont sortis par milliers pour dire non aux solutions proposées par Gaïd Salah, et à mon sens, c'est la plus cinglante des réponses."