La soirée de dimanche a été consacrée à la projection du court métrage Touiza, du réalisateur Karim Bengana à la cinémathèque de Béjaïa, à la faveur des 17es RCB qui s'y tiennent jusqu'au 26 septembre. Alger, 1995, dans une coquette maison sur les hauteurs de la ville, Yasmina, bonne chez une veuve obsédée par sa chienne dénommée "Touiza", s'attelle quotidiennement à faire le ménage, les courses et supporter le tempérament exécrable de sa patronne. Après un passé trouble, elle se remet sur "le droit chemin" pensant se laver des péchés de sa vie antérieure, suite à sa rencontre avec un extrémiste qui lui promet monts et merveilles. Pourtant, rien dans le comportement ni les paroles de la jeune femme ne laissent présager cet endoctrinement. On lui donnerait volontiers le Bon Dieu sans confession, mais l'œuvre de Bengana joue justement sur ça, sur la fragile frontière entre lâcheté et désespoir, qui, d'une minute à l'autre, peut laisser place à la tragédie. Une "humanisation du bourreau" assumée par le cinéaste, qui se glisse dans la peau d'un, ou d'une extrémiste en l'occurrence. Essayer de comprendre quelles sont les pensées qui traversent cet esprit dérangé, montrer peu pour dire beaucoup, jusqu'à la révélation finale. À côté du traitement de la décennie noire, où l'on a le point de vue d'une femme, démarche peu entreprise dans les films traitant du même thème, on a aussi un conflit entre deux femmes, abandonnées toutes les deux à leur sort et qui se jalousent, se réconfortent mutuellement paradoxalement, dans une continuelle incompréhension et détestation. Face à l'absurdité aussi, le parti pris de Kamel Bengana est de détourner l'attention sur la chienne de la patronne, "Touiza". Une méiose qui omet complètement le sujet du film au premier abord, face à la mort qui devient quotidienne, insignifiante, indolore… Y. A.