Dans une nouvelle démonstration de force, les Béjaouis étaient hier des milliers à battre le pavé dans les rues de la ville de Yemma Gouraya pour la 33e marche du vendredi. Et cette forte mobilisation a été marquée, une nouvelle fois, par une participation significative des jeunes, des femmes, des seniors et des personnes à mobilité réduite. Cela pour dire que le mouvement n'est pas près de faiblir, d'où la reprise en chœur de certains slogans : "Maranech habssine" (On n'est pas près de s'arrêter), "Djazaïr hourra dimokratia" (Algérie libre et démocratique) ou encore "Khlitou lebled ya serrakine" (Vous avez siphonné les richesses du pays, bande de voleurs). La procession était colorée par les drapeaux, nationaux et amazighs, les banderoles et les photos des détenus d'opinion mais aussi de Gaïd Salah, cible privilégiée des manifestants, qui réclament carrément sa tête. En effet, tous les carrés, nombreux en cette veille du 5 Octobre — une date symbolique qui rappelle aux Algériens un rendez-vous manqué — lui ont réservé des chants et des slogans, qui ne lui feront pas plaisir. Quelques manifestants ont même revêtu des habits traditionnels des pays du Golfe pour dire l'influence ou le rôle, jugé "négatif de ce minuscule Etat", les Emirats arabes unis en l'occurrence. Une nouvelle chanson a fait son entrée : "One, two, three, viva l'Algérie", "Hada chaâb la yourid houkm el âaskar min jadid" (Ce peuple ne veut plus, de nouveau, de régime militaire), "Dawla madania, machi âaskaria" (Etat civil, non militaire). Les protestataires ont juré aussi que l'élection n'aura pas lieu : "Makanch l'vot. Wallah mana habsine" (Il n'y aura pas d'élection. Par Dieu, on ne s'arrêtera pas), "Ya hna ya n'touma. Wallah ma n'votiw" (Ou c'est nous, ou c'est vous. Par Dieu, nous ne voterons pas). Les manifestants ont exigé bien sûr la libération des détenus politiques et d'opinion. Il a été réclamé la libération de Karim Tabbou, des autres hommes et femmes politiques, ainsi que des personnes arrêtées pour avoir porté ou manifesté avec le drapeau amazigh. L'un des manifestants a écrit sur une banderole : "Karim Tabbou n'est pas un prisonnier de la Kabylie, mais de toute l'Algérie." Pour signifier aux tenants du pouvoir que c'est toute l'Algérie qui réclame son élargissement.