Les robes noires, qui ont manifesté leur solidarité avec les détenus d'opinion, ont rejeté l'élection présidentielle du 12 décembre. Pari réussi pour les avocats du barreau de Béjaïa. La grève générale lancée jeudi dernier, par l'Ordre régional des avocats de Béjaïa (Orab), à travers l'ensemble des juridictions relevant de la même wilaya, a été appuyée par une imposante marche pacifique organisée dans la ville des Hammadites. C'est une journée de protestation en soutien au mouvement populaire né le 22 février, mais aussi une action de solidarité avec les détenus politiques et d'opinion ainsi que leurs familles. "Aujourd'hui, nous sommes encore sortis dans la rue pour afficher notre soutien total à la révolution du sourire et pour dire que les avocats de Béjaïa sont toujours aux côtés du peuple. Cette journée de protestation revêt un caractère particulier, puisqu'elle coïncide avec la date commémorative des manifestations du 17 Octobre 1961 à Paris", a déclaré le bâtonnier de Béjaïa, Me Salem Khatri, à l'issue de la marche. Ce dernier a souligné "l'engagement total et indiscutable" des robes noires de Béjaïa aux côtés du peuple "qui lutte pour une Algérie meilleure, une Algérie démocratique, de droit et de justice pour tous". "Ils peuvent nous tuer, nous jeter en prison ou nous dépouiller en nous faisant payer trop d'impôts, nous ne reculerons jamais, et ce, jusqu'à la libération de tous les détenus d'opinion et l'instauration d'un Etat démocratique", a-t-il martelé devant un parterre de journalistes. Selon Me Khatri, les "résidus" du régime ne reculent devant rien pour faire subir des pressions et autres intimidations à toute organisation ou tout militant s'inscrivant dans cette dynamique révolutionnaire pour le changement de système politique. Par ailleurs, le premier responsable de l'Orab a tenu à dénoncer "l'entêtement du pouvoir qui tente un passage en force, en voulant imposer une élection présidentielle rejetée par la majorité des Algériens", affirmant que "nous sommes contre la sacralisation des élections qui ne sont guère un idéal, mais juste un moyen de légitimer un pouvoir. De ce fait, nous réaffirmons notre rejet de la mascarade électorale en cours". L'orateur appellera, au passage, les deux représentants de l'Union nationale des barreaux d'Algérie (UNBA) qui siègent dans l'Autorité nationale "indépendante" chargée de l'organisation des élections (Anie), à se retirer de cette "mascarade électorale". La marche a démarré vers 10h du siège du Palais de justice pour s'achever vers 12h30, dans l'enceinte de la même institution judiciaire où un sit-in a été organisé sur le perron de la bâtisse abritant la cour de Béjaïa. Revêtus de leurs toges, les avocats ont brandi, tout au long de leur parcours, les deux drapeaux, national et amazigh, mais aussi des banderoles et pancartes portant des slogans chers au hirak, tels que "Libérez les détenus d'opinion", "Ulac l'vote ulac", "Dawla madania, matchi âaskaria" (Pour un Etat civil et non militaire), "Halte à la répression", "Adala moustaqila" (Pour une justice indépendante).