"Je n'ai plus de permis de visite pour aller les voir en prison", a affirmé Me Leïla Djardjer, précisant que son permis est valable jusqu'à la fin de l'instruction. Le verdict du procès des 5 détenus jugés le 23 octobre dernier par le tribunal de Bab El-Oued n'a pas été rendu, hier. La grève des magistrats a fait que l'annonce du verdict soit de fait ajournée. Un report qui pénalise ces jeunes détenus et leurs familles. Hier, Boudjemil Mohand, Idir Ali, Lakehal Kamel, Okbi Akli et Karoun Hamza étaient présents au tribunal. Néanmoins, ni les avocats et encore moins les dizaines de citoyens présents n'ont pu les voir. Près de deux heures après leur arrivée, le fourgon cellulaire les a reconduits à la prison d'El-Harrach où ils devraient attendre la fin du débrayage des magistrats pour connaître le verdict. Accusés d'atteinte à l'unité nationale pour avoir manifesté avec un drapeau amazigh lors des marches du mouvement populaire, ces jeunes détenus ont déjà purgé plus de quatre mois de détention. Lors de leur procès, le procureur de la République a requis 18 mois de prison ferme et 50 000 DA contre les prévenus. La grève des magistrats a prolongé leur séjour à El-Harrach, même si rien n'indiquait que le verdict attendu sera en leur faveur. Les familles des détenus, venues en nombre hier pour assister à l'annonce du verdict, sont reparties déçues. "Ces magistrats qui prolongent indirectement, du fait de leur grève, la détention de jeunes manifestants ne peuvent en aucun cas défendre une justice basée essentiellement sur le respect de la liberté humaine", a estimé une jeune dame, venue de Bouira, assister à l'annonce du verdict du procès de l'un de ses cousins détenus pour port du drapeau amazigh. C'est à la sortie du "panier à salade" de la cour du tribunal que les citoyens présents ont commencé à scander des slogans en faveur de la libération des détenus. Mais aussi des slogans hostiles à la justice et aux magistrats. "Vous n'êtes présents que pour condamner ou prolonger les condamnations, mais jamais pour libérer des innocents", ont dénoncé plusieurs citoyens. Cette colère et cette indignation des familles sont d'autant plus légitimes que même les autres fonctionnaires de la justice ont fait également grève. "On a été interdits d'accès à la salle d'audience", a dénoncé la mère d'un détenu. "Je n'ai plus de permis de visite pour aller les voir en prison", a dit, pour sa part, Me Leïla Djardjer, précisant que son permis est valable jusqu'à la fin de l'instruction. Elle a informé, par ailleurs, que certaines familles de détenus n'ont plus de permis pour rendre visite à leurs enfants. Il faut rappeler que les 6 autres détenus jugés par le tribunal de Sidi M'hamed d'Alger ignorent toujours le sort que leur réserve la justice.