"Ya Ali !" (en référence à Ali La Pointe). Ce cri de colère qui a déchiré le ciel gris de Montréal a donné le coup d'envoi de la marche populaire de la diaspora algérienne au Canada. Visiblement boostés par la mobilisation historique du peuple algérien à l'occasion des manifestations de vendredi dernier, coïncidant avec l'anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération nationale, les Algériens du Canada se sont mobilisés en grand nombre pour réussir, samedi, leur marche pacifique qui restera, sans doute, dans les annales du combat démocratique algérien. À midi passé, les organisateurs, avec brassards et badges, s'affairaient à régler les derniers détails logistiques avant de permettre à la procession humaine de s'ébranler depuis la place du Canada, au centre-ville de Montréal. Une banderole barrée par le mot d'ordre revendicatif "Libérez les détenus d'opinion en Algérie" est déployée en tête du premier carré. "Djazaïr hourra dimocratia" (Algérie libre et démocratique), scande la foule sous les yeux ébahis de Montréalais surpris par cette grande mobilisation des Algériens décidés à en finir avec le système politique en place depuis 1962. Les quelque 3 000 marcheurs ont emprunté la rue Peel avant de bifurquer vers la rue Sainte-Catherine, tout en scandant à tue-tête "Etat civil et non militaire". L'itinéraire de la marche a été dévié, à cause des travaux de réfection sur certaines rues. Ce qui a fait que la halte, qui devait être observée devant le consulat de France à Montréal, n'a pu avoir lieu. Il n'empêche que la manifestation a continué son parcours sur la rue Sherbrooke pour arriver devant le consulat général d'Algérie à Montréal. "La France complice", vocifère la foule excitée. L'improbable élection présidentielle du 12 décembre est vouée à l'échec, selon la promesse des marcheurs qui ont déployé une forêt de drapeaux (algérien et amazigh). "Ulac l'vote ulac", "Makanch le vote fi Montréal", "Pas de vote avec les bandes maffieuses", promettent les marcheurs décidés à faire capoter le scrutin auquel tient mordicus le pouvoir de fait, quand bien même la majorité du peuple le rejetterait à coups de référendums hebdomadaires, voire bihebdomadaires. Les portraits des leaders de la Révolution de 1954 et les détenus du hirak sont portés au pinacle par les manifestants. Exigeant le départ du système, ces derniers, arrivés devant le consulat d'Algérie, ont promis de continuer le combat libérateur du peuple algérien. Et ils l'ont fait de manière solennelle : Qassaman a retenti à Montréal. Yahia Arkat