Pour de nombreux observateurs de la scène libyenne, le soutien apporté par Moscou à Khalifa Haftar répond à la même logique russe en Syrie : étendre son influence en Afrique. La présence de mercenaires russes en Libye, aux côtés de l'Armée nationale libyenne (ANL) dirigée par le général Khalifa Haftar, inquiète sérieusement Rome, a rapporté l'agence de presse italienne AKI. Des parlementaires de la coalition au pouvoir en Italie ont dressé un constat des plus alarmants, selon la presse locale. "Après des mois d'impasse dans les combats dans la banlieue de Tripoli, ces mercenaires peuvent faire la différence sur le champ de bataille aux dépens du gouvernement de l'Accord national soutenu par l'ONU et l'Italie", ont déclaré des membres de la commission cinq étoiles des Affaires étrangères du Sénat italien. "Il n'est plus possible de rester silencieux près de la fenêtre pour voir les puissances mondiales et régionales intervenir aux yeux de tous dans un conflit qui déstabilise un pays d'une importance stratégique primordiale pour l'Italie", ont déclaré les députés du Parti démocrate, au sein de la coalition au pouvoir, selon toujours AKI. La présence des mercenaires russes avait été révélée par des médias libyens et internationaux, dont le New York Times qui a évoqué l'arrivée récemment d'environ 200 mercenaires russes en Libye, en soutien à "l'homme fort de la Libye", en référence à Khalifa Haftar, qui bénéficie d'un soutien sans ambiguïté de Moscou, sous-couvert de lutte contre le terrorisme islamiste dans ce pays voisin. Cette sortie de la coalition au pouvoir en Italie intervient dans un contexte de poursuite des violences armées en Libye, en raison du refus de M. Haftar de négocier avec le gouvernement d'union nationale (GNA), dirigé par Fayez al-Serraj. Khalifa Haftar est déterminé à prendre le contrôle de la capitale Tripoli, qu'il encercle depuis le 4 avril dernier sans avancer d'un iota, face à la résistance des troupes du GNA, internationalement reconnu, et qui bénéficie du soutien de nombreuses milices de l'Ouest libyen. Mais pour les autorités parallèles de l'Est, basées à Tobrouk, dont le Parlement élu dirigé par Aguila Salah, il s'agit de groupes terroristes qui prennent en otage une partie du pays et qu'il faudrait donc les décimer, avant de s'engager sur la voie du dialogue politique. Ainsi, alors que de nombreuses tractations diplomatiques sont en cours, pour arracher un cessez-le-feu en Libye, l'ANL continue de bombarder Tripoli et d'autres villes de l'Ouest libyen, dont Syrte et Misrata, faisant des victimes civiles et détruisant de nombreuses infrastructures publiques vitales, comme les routes, les aéroports, des écoles et des structures sanitaires. Ce qui a provoqué de vives réactions de dénonciation au niveau régional et international. Mais en l'absence d'une position unifiée de la communauté internationale, Khalifa Haftar ne cessera pas son opération de conquête de Tripoli, ce qui met en échec d'avance tous les efforts diplomatiques entrepris depuis des semaines par l'Allemagne, dans l'objectif d'organiser une conférence internationale sur la Libye à Berlin.