L'impératif de réconciliation nationale peut-il se réaliser au détriment des familles des victimes du terrorisme envers lesquelles la nation restera en dette permanente ? Aujourd'hui tout le monde partage la volonté du président de la République de tourner la douloureuse page de la crise politique qui a frappé le pays pendant dix années. Le projet dont il a exposé hier les grandes lignes aux algériens et qui serasoumis à leur arbitrage le 29 septembre prochain, tend à concrétiser cet objectif. Cependant, ce désir de réconciliation qu'il dit sentir chez la plupart des citoyens ne doit pas se faire au détriment d'une vérité qui doit identifier chacun pour le rôle qu'il a eu justement pendant cette douloureuse crise. C'est le cas des familles des victimes du terrorisme que le discours sur la réconciliation nationale tend à passer à la trappe. Dans son discours, le président leur a consacré à peine quelques lignes pour leur rendre hommage, ayant eu des mots de reconnaissance et d'éloge pour ces familles dont les leurs ont payé de leur vie à cause de la folie islamo-terroriste et qui ont apporté leur caution à la concorde civile. “Les familles de tous nos martyrs et des victimes du terrorisme ont fait preuve d'un haut niveau de noblesse et de nationalisme en puisant dans leur foi le courage nécessaire pour se rallier, dans leur très grande majorité, à la concorde civile, chacune affirmant ainsi son souci d'éviter à une autre famille algérienne de connaître les mêmes souffrances et les mêmes pertes”, a-t-il dit dans son discours. Cependant ces mots de reconnaissance pour ces familles ne doivent pas occulter leurs intérêts matériaux et moraux. Cela doit se traduire, au-delà de cette reconnaissance, par des dépositions légales à travers lesquelles seront consacrés ces droits. Comme les institutions de l'Etat portent un intérêt pour la question des disparus, elles doivent en faire de même pour cette frange des victimes de la tragédie nationale dont les organisations chargées de les défendre ont accepté aujourd'hui de s'inscrire dans la démarche de réconciliation nationale. La revendication d'une place pour les victimes du terrorisme et de leur famille ne vise nullement à cultiver encore les clivages, que la démarche du président vise justement à abolir, mais à restituer, à tous le moins pour la mémoire, leur contribution au combat pour la sauvegarde de l'Algérie républicaine. Pour le président Bouteflika, “ce projet c'est aussi une invitation aux algériens à marquer solennellement un vibrant hommage aux martyrs du devoir national et aux victimes du terrorisme, ainsi que notre solidarité collective envers leur famille”. N. S.