Le rejet du système et de l'élection présidentielle, ainsi que la libération des détenus d'opinion ont été les leitmotive exprimés en ce 39e vendredi du "hirak". Au 39e vendredi de mobilisation contre le système politique, les Algérois n'ont pas fléchi. Ni la pluie, ni le froid, ni la grêle et encore moins la présence policière massive n'ont empêché des milliers de personnes d'arpenter les principales rues de la capitale pour rappeler, une nouvelle fois, leur principale revendication, à savoir le départ du système avant d'organiser l'élection présidentielle. à la veille du début de la campagne électorale, la mobilisation citoyenne contre le pouvoir en place n'a pas baissé d'intensité. Déjà, dans la matinée, des dizaines de citoyens ont investi les rues du centre-ville d'Alger. Bravant un froid glacial et un dispositif sécuritaire a priori dissuasif, les manifestants ont scandé les slogans habituels. "Maranach habsine" (On ne va pas s'arrêter) ou encore "Tetnahaw gaâ". Les policiers, lourdement équipés et déployés en force aux abords des principales artères de la ville, ne bronchent pas. Comme chaque vendredi, les rangs des manifestants grossissent en début d'après-midi. à la fin de la prière, une averse de grêle et de pluie commencent à s'abattre sur la ville. Une tempête qui n'empêchera pas les manifestants de converger vers le centre-ville. Du quartier populaire de Belouizdad, d'El-Harrach ou encore de Bab El-Oued, une marée humaine a bravé le déchaînement de Dame Nature pour rappeler leur détermination à aller "jusqu'au bout". "Le peuple veut la liberté", scandent des voix à la rue Hassiba-Ben Bouali, sous une pluie battante. "Elli yentakhab khayene" (Celui qui vote est un traître), scande un autre carré de marcheurs, qui a bravé la forte grêle et les rafales de vent. D'autres manifestants, moins téméraires, se sont abrités sous les balcons. Ils ont joint leur voix à celle de ceux qui sont restés sur la chaussée. Au fur et à mesure que le temps passait, la place Maurice-Audin se remplissait de manifestants. Les marcheurs viennent d'arriver de Bab El-Oued sous les cris de "Ahna Ahfad Amirouche, marche arrière man wellouch, talbine el-hourriya" (Nous, descendants d'Amirouche, nous ne reculerons pas ! Nous demandons la liberté !), des slogans ajoutés ces dernières semaines aux classiques du mouvement populaire. D'autres citoyens ont préféré un autre mode de manifestation : ils ont distribué des sandwichs, des fruits et des bouteilles d'eau aux marcheurs. C'est le cas de ce quinquagénaire qui, une boîte à la main, invite les manifestants à manger des dattes qu'il leur offre. Pour s'adapter à l'actualité, les manifestants n'ont pas oublié de faire allusion à l'élection présidentielle. "Tebboune el-cocaïne, heb iwelli président" (Tebboune de la cocaïne, en référence aux soupçons qui pèsent sur le fils de l'ancien Premier ministre dans l'affaire dite El-Bouchi, veut devenir président), scandent les manifestants. Certains ont fait preuve d'ingéniosité en arborant des pancartes et des caricatures brocardant les cinq candidats à l'élection présidentielle . "Libérez les détenus" est l'un des slogans devenu un "classique" qui a marqué la manifestation d'hier. Dans beaucoup de carrés, les portraits des détenus sont arborés. "Libérez les détenus, arrêtez les (gens) de la cocaïne !", scandent des voix devant la Faculté centrale. À ce moment-là, la pluie fait place à une brève éclaircie. Des dizaines de citoyens continuent alors d'affluer vers la Grande-Poste, toujours fermée au public. Pour ne pas rester en marge de la marche du peuple, certains journalistes ont organisé un rassemblement juste avant le début de la manifestation. Une manière pour certains hommes et femmes des médias de se démarquer des directions qui empêchent la couverture des marches populaires. Plus que cela, pour certains journalistes, c'était un cri d'alarme contre les pressions qu'exerce le pouvoir sur les médias ces derniers temps. Alors que le ciel s'éclaircit, les manifestants se dispersent dans le calme en se donnant déjà rendez-vous pour un 40e vendredi. Entre-temps, la campagne électorale aura déjà commencé.