Le 50e vendredi de manifestation à Bordj Bou-Arréridj pour le changement radical du système a démontré, encore une fois, que le mouvement populaire refuse de s'inscrire ni d'évoluer dans l'agenda de la nouvelle équipe dirigeante du pays. La mobilisation d'hier confirme encore la volonté du hirak d'aller vers les objectifs qu'il s'est tracés. Malgré une forte présence policière, la marche était immense, mémorable et pacifique. Les Bordjiens étaient fidèles à leurs revendications : un Etat civil, la libération des détenus d'opinion, la fin des Présidents désignés, non au gaz de schiste, non au retour de la bande, non à la répression... Le drapeau national et l'étendard amazigh, tout comme les portraits des détenus, ont été brandis en grand nombre. À un mois de l'installation de Tebboune, le pouvoir n'a pas oublié ses anciennes pratiques de casse des manifestations. La rupture de confiance entre les hautes sphères du pouvoir et le peuple de dissidents est évidente. Les manifestants ont mis en exergue leur rejet de toutes les manœuvres du pouvoir et réclament son départ inconditionnel. "Le peuple veut l'indépendance !", "On ne s'arrêtera pas !", "La moitié de la bande est en prison, l'autre moitié est au pouvoir, les médias divisent le hirak et le juge obéit aux instructions du téléphone", criait la foule qui ne croit pas aussi à la menace terroriste en scandant : "Vous ne nous faites pas peur avec la décennie noire, on a grandi dans la misère !", "Le peuple s'est libéré, c'est lui qui décide. Gouvernement civil !", "Le peuple veut la chute du régime"… Les Bordjiens ont aussi dénoncé le recours de Tebboune aux anciens du régime pour des "consultations". "Pas de dialogue avec la bande !", "Etat civil et non militaire !", "Ô Ali ! nous voulons la liberté, Ô Ali ! tes enfants ne vont pas s'arrêter !", scandait la foule. En signe de solidarité avec les détenus d'opinion et politiques, des portraits géants, peints en noir et blanc, de Karim Tabbou, Fodil Boumala, Samir Belarbi et l'étudiante Nour El-Houda Oggadi, ainsi que celui de Brahim Laâlami (fils de la région), ont été brandis par les manifestants. Malgré les intimidations policières et la pression exercée sur les marcheurs, la procession a progressé le long de son itinéraire en chantant et dans la liesse. C'est dire que le caractère pacifique a encore prévalu. La foule s'est, par ailleurs, dispersée sans le moindre incident.