La Cour suprême a statué, le 22 janvier dernier, sur le pourvoi en cassation introduit par le procureur de la République contre la correctionnalisation par le juge d'instruction des faits reprochés aux inculpés. Le procès de l'importateur et promoteur immobilier Kamel Chikhi ainsi que de six autres prévenus, qui devait se tenir hier, au tribunal de Sidi M'hamed, a été reporté au 26 du mois en cours. Après plus de deux heures d'attente, le magistrat a informé les avocats de sa décision d'ajourner l'audience, en raison de l'absence des détenus de la prison de Koléa, à la barre. En revanche, Kamel Chikhi, emprisonné au centre pénitentiaire d'El-Harrach, était présent au tribunal. Le magistrat n'a pas fourni d'explications sur ce fait qualifié d'"exceptionnel" par Me Miloud Brahimi. Mais quelques membres de la défense supposent que le parquet a omis de formuler une demande d'extraction de la prison auprès de l'établissement pénitentiaire dans lequel sont incarcérés les six autres prévenus. Devaient comparaître, en même temps que Kamel Chikhi, Khaled, le fils du président Abdelmadjid Tebboune, le chauffeur de l'ancien DGSN Abdelghani Hamel, l'ex-procureur de la République de Boudouaou et son adjoint, ainsi que l'ex-P/APC de Ben Aknoun et le fils de l'ancien wali de Relizane. Tous sont accusés de "trafic d'influence, abus de fonction, corruption et perception d'indus cadeaux". Le fils de l'ancien wali de Relizane et l'ex-P/APC de Ben Aknoun sont soupçonnés d'avoir épaulé Kamel Chikhi dans ses démarches pour obtenir un permis de construire d'un immeuble de 15 étages. Le document est effectivement délivré par l'ex-P/APC de cette localité, mais vite annulé par son successeur qui aurait envoyé des émissaires à Chikhi pour lui faire miroiter une offre plus alléchante encore : une possibilité de bâtisse de 18 étages. "Le boucher", principal accusé dans l'affaire des 701 kg de cocaïne Finalement, il sera à son tour placé en détention préventive dans le cadre de l'enquête ouverte après le décès, au mois d'avril dernier, d'un employé dans la chute d'un panneau publicitaire. Les investigations lancées par la justice ont permis de découvrir une entorse à la réglementation dans le marché décroché par l'entreprise d'affichage urbain AD Display. Alors qu'il est reproché à Khaled Tebboune d'avoir usé du statut de son père, à l'époque ministre de l'Habitat, pour aider le promoteur immobilier à acquérir une assiette foncière pour un projet d'hôtel. Kamel Chikhi surnommé "Le boucher", principal accusé dans l'affaire des 701 kg de cocaïne saisis le 29 mai dernier au port d'Oran, a reconnu, lors de sa première audition, qu'il avait prêté au procureur de Boudouaou et à son adjoint respectivement 80 à 90 millions de centimes pour le premier et 100 millions de centimes pour le second. "Des sommes que les deux magistrats ont remboursées", certifie "Le boucher". Il raconte qu'il entretenait des liens d'amitié avec les deux mis en cause depuis cinq ans, lorsqu'ils l'avaient sollicité pour l'acquisition de deux appartements. "Ils ont visité les logements, mais n'ont pas donné suite parce que la banque ne leur a pas accordé le crédit nécessaire. Depuis, nous sommes restés en contact", poursuit Kamel Chikhi lors de son interrogatoire. Le procureur de la République de Boudouaou et son adjoint sont, eux aussi, restés sur cette version des faits. Alors que la justice pense qu'ils ont bénéficié de logements de haut standing en versant à Kamel Chikhi des sommes symboliques. Quant au chauffeur personnel de l'ancien DGSN, il aurait facilité, à plusieurs reprises, les passages de Chikhi aux postes-frontières, lors de ses déplacements à l'étranger. Les avocats des prévenus reprochent au juge d'instruction d'avoir basé ses investigations sur uniquement le visionnage des vidéos des caméras installées dans le bureau du magnat de l'immobilier. "Et encore, il paraît que les séquences n'étaient parfois pas complètes et d'autres dépourvues de son", dénonce Me Amrouche, avocat du chauffeur du DG de la police nationale, qui reproche également au magistrat instructeur de ne pas avoir remis une copie de ces vidéos à la défense. À rappeler que la Cour suprême a statué, le 22 janvier dernier, sur le pourvoi en cassation, introduit par le procureur de la République contre la correctionnalisation par le juge d'instruction des faits reprochés aux inculpés. Cette haute instance a débouté le parquet et confirmé l'avis du juge d'instruction.