Si le coronavirus menace, en Algérie, le silence des plus hautes autorités de l'Etat a de quoi inquiéter, particulièrement après les trois décès enregistrés au Centre hospitalo-universitaire d'Oran. Dimanche 23 février, le Conseil des ministres se réunit sous la présidence du chef de l'Etat, Abdelmadjid Tebboune, avec au menu du jour la rationalisation des dépenses de l'Etat, l'avant-projet de loi relatif à la prévention et à la lutte contre la discrimination et le discours de haine, la situation actuelle des zones industrielles, la relance de l'industrie cinématographique entre autres dossiers soumis à l'examen et à l'approbation des membres du gouvernement. Un Conseil des ministres somme toute banal, mais qui contraste avec l'actualité mondiale du moment. Alors que le gouvernement débat encore sur la pertinence de la sous-traitance industrielle étrangère, le monde se prépare à une pandémie qui paraît de plus en plus inéluctable. Même si l'épidémie de coronavirus continue de décliner en Chine, selon l'OMS, le risque d'une extension sur le reste de la planète s'accroît avec le développement de trois foyers actifs en Corée du Sud, en Iran et en Italie. Le bilan mondial de l'épidémie, au mardi 25 février, a dépassé les 80 000 cas, dont un peu plus de 77 000 en Chine et frôle les 2 700 morts. Hors de Chine, il est marqué par l'apparition de cas dans cinq nouveaux pays en 24 heures — Afghanistan, Bahreïn, Koweït, Irak et Oman — et un nombre d'infections confirmées qui continue de croître en Iran, en Italie et en Corée du Sud. Avec 893 personnes contaminées, dont 8 sont décédées, ce dernier pays est le deuxième le plus touché après la Chine. Une mission de l'OMS est partie pour l'Iran, qui recense officiellement 15 morts. L'Italie, qui a comptabilisé 229 cas, dont 7 mortels, est de loin le pays le plus touché en Europe, devant l'Allemagne (16 cas), rapporte le journal Le Monde. Et c'est l'Italie qui inquiète le plus puisque le ministre français de la Santé, Olivier Véran, indique que même "s'il n'y a pas d'épidémie en France, il y a une situation problématique en particulier aux portes de la France, en Italie, que nous regardons avec beaucoup d'attention". Si le coronavirus menace, en Algérie, le silence des plus hautes autorités de l'Etat a de quoi inquiéter, particulièrement après les trois décès enregistrés au Centre hospitalo-universitaire d'Oran (CHUO). Cette absence de communication institutionnelle laisse la porte grande ouverte aux rumeurs les plus folles et inscrit un début d'épidémie là où elle n'existe pas pour le moment. Et ce ne sont pas les déclarations rassurantes du ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abderrahmane Benbouzid, qui vont contribuer à apaiser les craintes des professionnels de la santé, aux avant-postes d'une quelconque menace sanitaire, ni du citoyen lambda à l'écoute des informations venant de la proche Italie et ni des Algériens qui s'interrogent sur l'existence d'un plan national de prévention contre ce genre d'épidémie. En effet, et dans la perspective d'une propagation de l'épidémie à la France, l'Algérie est directement exposée au virus même si un contrôle "rigoureux et systématique" est opéré sur l'ensemble des aéroports en Algérie, comme l'a affirmé Abderrahmane Benbouzid. Outre cette menace "européenne", les frontières subsahariennes du pays peuvent être une autre source d'inquiétude d'autant que le continent africain possède, actuellement, de forts liens commerciaux avec la Chine, comme le rappelle la revue médicale The Lancet qui indique que l'Algérie, l'Egypte et l'Afrique du Sud représentent les portes d'entrée probables du nouveau coronavirus en Afrique. Si notre pays peut se prévaloir d'une surveillance médicale appropriée au niveau de ses infrastructures aéroportuaires, qu'en est-il précisément de ses frontières Sud ? Un sujet éludé par la communication officielle qui préfère le mutisme à propos d'une menace planétaire. Pour rappel, une note de la Direction générale de la prévention et de la promotion de la santé du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, en date du 20 février dernier, a été adressée aux autorités et responsables sanitaires locaux quant à la mise à jour des définitions et des modalités de surveillance, de détection, de notification et de conduite à tenir devant un cas suspect ou confirmé d'infection par le nouveau coronavirus Covid-19.