Le personnel soignant redoute surtout d'être infecté et de devenir par ricochet contaminant pour ses proches et ses patients. Une situation inquiétante. L'accès aux tests est restreinte même pour le corps médical. En première ligne face à la pandémie, médecins, infirmiers, agents de nettoyage et de sécurité se battent depuis plusieurs semaines contre le Covid-19. Ils livrent une guerre avec peu de moyens. Sans équipements de protection adéquats ni même d'endroits appropriés pour reprendre leur souffle. "C'est une situation angoissante qui a entraîné un excès de panique chez le personnel soignant dans son ensemble. Il fallait préparer le médecin et même l'agent d'accueil à recevoir les cas de coronavirus comme tous les autres malades en prenant les précautions nécessaires et en les dotant de tous les équipements de protection. Moi-même, je n'ai pas eu droit à un masque et je ne sais pas pourquoi", témoigne le professeur Mansour Brouri, spécialiste en médecine interne à l'hôpital de Birtraria. Le personnel soignant redoute surtout d'être infecté et de devenir par ricochet contaminant pour ses proches et ses patients. Une situation inquiétante. L'accès aux tests est restreint même pour le corps médical. "Je n'ai pas besoin d'une prime, mais plutôt de m'éviter ce risque en me donnant du matériel adapté pour me protéger et protéger les patients", réagit un médecin de l'EPH d'Aokas à la promesse des autorités du pays d'octroyer une prime de risque au personnel médical pendant une durée de trois mois renouvelable, si c'est nécessaire. Le président du Syndicat national des praticiens de santé publique, Lyes Merabet, reconnaît que "les conditions de travail sont difficiles du fait d'une organisation frileuse qui se met en place lentement pour s'adapter à une situation épidémique inédite. Le circuit de prise en charge n'étant pas différencié, les structures de santé de proximité et les établissements de soins hospitaliers subissent une pression terrible notamment dans la wilaya de Blida (épicentre de l'épidémie). Les professionnels de la santé conscients de leur mission sont mobilisés pour relever ce défi sanitaire. Ils continuent de travailler dans des conditions inappropriées du fait du manque flagrant en moyens essentiels de protection, d'outils de diagnostic, d'exploration et de prise en charge des cas compliqués". Sans avancer un chiffre exact, Lyes Merabet atteste que dans plusieurs équipes soignantes, des cas de médecins contaminés ont été enregistrés. Et dans certains cas, les contaminés sont admis en réanimation. "Nous avons noté une grande anxiété, voire une crainte maintes fois exprimée chez le personnel soignant. Cette attitude est compréhensible mais ne doit pas entraver le déroulement de notre action. Nous sommes en train d'y remédier", confirme, pour sa part, le professeur Nourredine Zidouni, chef du service pneumologie du CHU de Beni Messous. Selon le professeur Brouri, "le personnel de santé est prêt à tous les sacrifices. Seulement, il n'a pas été épaulé suffisamment matériellement et préparé psychologiquement pour faire face à cette épidémie. Il a été complètement ignoré. Les gens réagissent instinctivement face au manque de moyens". Et d'ajouter : "On a tardé à mettre en place une feuille de route claire. C'est le cafouillage, la confusion. On a laissé les structures hospitalières s'organiser seules et du coup on se retrouve avec des services qui ont réduit au strict minimum leurs activités et d'autres qui ont fermé complètement."