Soucieuse de l'indépendance des fédérations nationales, la FIFA veut absolument que les organes juridictionnels de la FAF, à savoir la commission de l'éthique, de l'intégrité et la commission de discipline, rendent leurs verdicts dans ce dossier sous peine de sanctions. Explications. Comme il fallait bien s'y attendre, l'épisode scabreux – loin d'être inédit dans le football algérien – de l'enregistrement audio impliquant le directeur général de l'ESS, Fahd Helfaïa, et le manager, Nassim Saâdoui, dans une affaire présumée d'arrangement de matches de la Ligue 1, a suscité la curiosité de la FIFA. La puissante fédération mondiale, informée visiblement par des lanceurs d'alerte, a immédiatement réagi, sommant la FAF de faire toute la lumière sur cette affaire grossière dans le cadre des organes juridictionnels de la FAF. En effet, la Fédération révèle qu'une réunion a été tenue vendredi dernier par vidéo-conférence entre la Fédération algérienne de football, représenté par Salah-Bey Aboud, directeur de la communication et chargé du dossier Intégrité, et Ennio Bovolenta, responsable du département Intégrité de la FIFA, Vincent Ven et François Braun, tous deux Officiers Intégrité au sein de l'instance internationale au sujet de l'affaire de l'enregistrement sonore. "Il a été retenu des discussions et des échanges ce qui suit : la FIFA n'aura pas à s'impliquer directement car il s'agit d'une affaire interne qui devra être traitée par les instances et les juridictions algériennes. Les commissions juridictionnelles dépendantes de la FAF et de la LFP devant traiter cette affaire auront à s'appuyer sur leurs propres règlements et code disciplinaire. Le nouveau responsable du département Intégrité de la FAF devrait assister d'ores et déjà à l'audition de l'intermédiaire des joueurs (porté officiellement sur la liste des intermédiaires publiée le mois de décembre 2019 sous le numéro 126) convoqué pour le 7 juin 2020 par la Commission de l'éthique. Il a été convenu d'organiser une autre réunion la semaine prochaine, en présence cette fois du nouveau responsable du département Intégrité de la FAF afin de procéder aux présentations d'usage et d'échanger sur le fonctionnement de cette nouvelle structure", explique la FAF. Et d'ajouter, s'agissant de la mise en place d'un département Intégrité au niveau de la Fédération algérienne de football, que "la FIFA a exprimé sa grande satisfaction de voir la FAF se doter d'une structure similaire et dont le responsable sera désigné la semaine prochaine. Le représentant de la FAF a présenté une genèse de la démarche entreprise depuis juin 2019 à ce jour à M. Bovolenta qui a été désigné récemment à la tête de ce département au niveau de la FIFA. Ce dernier a réitéré la disponibilité et l'engagement de la FIFA à poursuivre son accompagnement de la FAF à travers plusieurs volets, dont la prise en charge d'une formation du futur responsable de ce département, la remise de supports didactiques et toute autre aide et orientations pour le bon fonctionnement de cette structure". La FAF risque des sanctions si… Il est clair que l'annonce par le ministère de la Jeunesse et des Sports algérien, Sid Ali Khaldi, du dépôt d'une plainte contre X au niveau du procureur général d'Alger dans cette affaire de présumée corruption et surtout sa déclaration appelant les instances sportives à limiter les sanctions aux responsables sans toucher les clubs font craindre, à la FIFA, une intervention des pouvoirs publics dans les affaires de la FAF, ce qui est contraire à ses statuts. Même si la FIFA ne peut pas interdire au MJS de porter l'affaire devant une juridiction civile, la fédération mondiale, soucieuse de l'indépendance des fédérations nationales, veut absolument que les organes juridictionnelles de la FAF, soit la commission de l'éthique, de l'intégrité et la commission de discipline rendent des verdicts dans ce dossier. Pour la FIFA, la FAF doit se doter d'une justice sportive. Les organes juridictionnels sont censés avoir les moyens de mener une enquête sérieuse afin d'identifier les coupables et prendre les sanctions, purement sportives, qui s'imposent. C'est dans ce cadre-là justement que la FAF à l'intention de recruter un spécialiste de l'authentification des enregistrements audio, qui a déjà travaillé avec Interpol et un ancien haut gradé de la Sûreté nationale pour les besoins de fonctionnement de la commission d'intégrité. L'identité des deux responsables n'a pas été, cependant, révélée pour le moment par la FAF. L'intervention de la FIFA expose également la Fédération algérienne à des sanctions dans le cas où ce dossier n'est pas pris en charge avec le maximum de rigueur et surtout s'il ne débouche pas sur des mesures concrètes. Les conclusions définitives seront en effet scrutées par la commission de l'éthique. Il faut savoir que la FIFA mène une lutte sans merci contre les matches truqués.
Extension des sanctions au niveau international L'intégrité dans les résultats des matches est pour elle une priorité absolue. Le code disciplinaire de la FIFA stipule que "celui qui aura entrepris des démarches en vue d'influencer le résultat d'une rencontre de manière contraire à l'éthique sportive sera sanctionné d'une suspension de match(es) ou d'une interdiction d'exercer toute activité relative au football. Le club ou l'association dont dépend le joueur ou l'officiel qui s'est rendu coupable de l'infraction peut se voir infliger une amende. Dans les cas graves, la sanction peut aller jusqu'à l'exclusion de la compétition, la rétrogradation, le retrait de points ou encore la restitution des prix". C'est dire que les deux personnes impliquées dans cet enregistrement et les clubs cités risquent gros, très gros même. Ceci au moment où le ministre de la Jeunesse et des Sports, Sid Ali Khaldi, souhaite que les sanctions ne touchent que les responsables. Dans le cadre de la procédure de la commission de discipline, le directeur général de l'ESS, Fahd Helfaïa, a été entendu jeudi dernier par la commission de discipline. Le manager Saâdaoui Nassim (intermédiaire de la FAF) est convoqué pour sa part devant la commission de discipline demain 11h au siège de la Ligue de football professionnel. Il est également convoqué pour le 7 juin prochain par la commission de l'éthique de la FAF. En vertu des recommandations de la FIFA, les éventuelles sanctions de la FAF feront l'objet automatiquement d'une extension au niveau international. L'article 122 du code disciplinaire de la FAF stipule clairement que "lorsque l'infraction commise est grave, notamment en cas de dopage, de corruption, d'influence sur le résultat d'un match, de comportement incorrect envers des officiels de matchs, de falsification de documents, de fraude et dissimulation d'identité ou toute autre sanction supérieure à dix (10) matchs, la LFP doit demander à la FAF de communiquer à la FIFA les sanctions prises pour l'extension au niveau mondial. La requête doit être adressée par écrit à la FAF et accompagnée d'un exemplaire certifié conforme de la décision. Elle doit indiquer l'adresse de la personne sanctionnée et celle de son club ainsi que sa nationalité. Si la FAF constate que la LFP ne demande pas l extension des effets des décisions qui devraient avoir une portée mondiale, elle prendra elle-même cette décision".