La coïncidence n'a rien visiblement de fortuit. Quelques heures seulement après que le président du parti Jil Jadid, Soufiane Djilali, ait révélé une rencontre entre lui et le président Abdelmadjid Tebboune, lequel aurait "accepté d'agir" pour que Samir Belarbi et Karim Tabbou retrouvent la liberté, ce dernier a réagi en fustigeant les "opportunistes combinards" et les "marionnettes politiques". Dans une lettre adressée aux Algériens depuis sa prison à Koléa, en réponse aux marques de sympathie exprimées à son égard par de nombreux citoyens à l'occasion de son anniversaire, Karim Tabbou ne dissimule pas son optimisme en des lendemains meilleurs. "Des jours meilleurs, nous y approchons de plus en plus, même si parfois les chemins de la liberté sont semés d'obstacles et de difficultés. Nous devons garder l'espoir. Ensemble, nous y arriverons. Ce sont des jours qui nous apporteront de nouvelles sensations", écrit-il dans cette lettre publiée mardi en soirée par son frère. "Des senteurs de liberté qui dissiperont toutes cette puanteur d'un régime finissant et en décomposition", ajoute-t-il. Le coordinateur de l'UDS (parti non agréé), qui devrait retrouver la liberté fin juillet prochain, une fois sa peine d'une année purgée, fait-il allusion à une éventuelle libération anticipée ou table-t-il sur des changements, à ses yeux, inéluctables ? En tout cas, il estime qu'une décantation dans le champ politique est impérative. "Ces jours permettront aussi un tri salutaire entre les vrais et les faux militants. Il est impératif que soient distingués les hommes et les femmes de conviction de ces opportunistes combinards". "Ces derniers (opportunistes) sont otages de leurs appétits. Ils sont irrésistibles à l'attrait de la mangeoire, c'est une nouvelle génération d'opportunistes, de marionnettes politiques prêts à tous les emplois", fustige-il encore. Si elle peut concerner de nombreux acteurs politiques que Karim Tabbou n'avait pas hésité à vilipender bien avant ses déboires judiciaires, la charge semble particulièrement cibler Soufiane Djilali dont les postures politiques déroutent les observateurs depuis la conférence de Mazafran. Mardi, le président de Jil Jadid a fini par rendre public le contenu d'une requête auprès d'Abdelmadjid Tebboune qu'il avait gardée secrète jusque-là. Selon lui, Abdelmadjid Tebboune a accepté d'agir dans le cadre de ses "prérogatives" et comme " gage de son intention de favoriser l'apaisement et le dialogue national" pour que les deux figures du hirak retrouvent "au plus vite" leur liberté. Une démarche qui a suscité de nombreuses interrogations et critiques sur les réseaux sociaux d'autant que le nombre des détenus d'opinion dépasse la cinquantaine. Comme pour marquer son territoire et situer la frontière entre lui et ceux qu'il brocarde, Karim Tabbou décline sa conception de l'"Algérie nouvelle". Selon lui, "une vraie nouvelle Algérie pour laquelle nous nous battons doit être : inclusive de toutes les représentations politiques et sociales réelles ; respecte le suffrage universel et le principe de l'alternance au pouvoir ; respecte l'exercice de toutes les libertés ; donne la prime au droit". "Une vraie nouvelle Algérie est celle qui donne envie à chacun de nous de s'impliquer dans la construction d'un avenir commun. Une vraie nouvelle Algérie est celle qui s'interdit l'emprisonnement des journalistes, des militants, des syndicalistes… Une vraie nouvelle Algérie est celle qui met toutes et tous sous l'autorité de droit", conclut la lettre.