Alors qu'une commission du ministère de la Santé est attendue pour enquêter sur cette nouvelle affaire, la direction de l'hôpital a pris des mesures conservatoires en suspendant quatre employés dont un médecin. Quatre personnes dont un médecin, deux paramédicaux et un agent de service ont été suspendus, hier, par la direction du CHU Ibn-Badis de Constantine suite à la diffusion sur les réseaux sociaux de deux vidéos montrant des images choquantes sur les conditions de prise en charge catastrophique des malades atteints de Covid-19. Des scènes insoutenables filmées vraisemblablement par des proches des patients dans deux services du centre hospitalo-universitaire, lesquelles ont incité les responsables de cet établissement, selon son chargé de communication, à diligenter une enquête sur les dysfonctionnements constatés au niveau des services dédiés à la prise en charge des patients infectés par le coronavirus. Une commission du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière est d'ailleurs attendue à Constantine, au moment où la direction du CHU qui a tenu une réunion en urgence dans la soirée de jeudi, reconnaît l'existence de certaines carences mais néanmoins dénonce une diffamation dont l'objectif, indique-t-elle, est "d'induire en erreur l'opinion publique". En effet, visionnées par des milliers d'internautes et largement relayées sur les réseaux sociaux, les vidéos en question montrent des patients atteints de Covid-19 livrés à eux-mêmes sans la moindre assistance médicale, se plaignant de l'abandon dont ils font l'objet dans des chambres désertes du service de médecine interne du CHU de Constantine, transformé en centre d'accueil des malades du coronavirus depuis le début de la pandémie. Des scènes qui ont fait le buzz sur la Toile depuis jeudi et qui ont suscité une vaste vague d'indignation des citoyens. Dans la première vidéo, une femme prend la parole pour dénoncer "des conditions d'hospitalisation inhumaines des patients". "Chaque jour, il y a des morts, il n'y a pas de surveillance, ma sœur atteinte du virus et admise récemment, dort depuis trois jours sur une chaise roulante", s'écrie-t-elle. Plus grave, la vidéo montre également un patient décédé de coronavirus et dont le corps a été laissé sur place parmi les autres malades. "Je suis venu ramener le petit-déjeuner à mon père, je l'ai trouvé mort, tout seul sur son lit, personne ne nous a prévenus", dira un homme visiblement dévasté par la mort de son père et les conditions dans lesquelles il a trouvé sa dépouille. À travers la même vidéo, la femme lance un appel au président de la République, Abdelmadjid Tebboune : "Nous sommes à l'abandon, nous sommes en train de crever", martèle-t-elle. Une autre dame se plaint aussi pour son mari qu'elle montre, une sonde à la main dans un état lamentable, des vêtements ensanglantés et allongé sur un lit insalubre. Elle dénoncera également l'absence de prise en charge et s'émeut de "la maltraitance qu'elle dit avoir subie de la part d'un médecin du même service". Des patients abandonnés à leur sort La vidéo montre également des couloirs et des salles de soins vides attestant de l'absence du personnel soignant. Dans la deuxième vidéo, postée quelques minutes plus tard, une autre femme montre un service de pédiatrie consacré aussi aux malades de la Covid-19. Le constat est le même, un service quasi vide, on ne voit ni médecins ni infirmiers. "Il est 9h30, aucun médecin n'est encore passé, les malades sont abandonnés à leur sort, ils sont en train de mourir", s'écrie la femme. Ce n'est d'ailleurs pas le premier scandale qui ébranle le secteur de la santé à Constantine puisqu'au mois de Ramadhan passé, une vidéo montrant un jeune homme contraint d'aller récupérer et faire sortir la dépouille de son père de la morgue de l'hôpital d'El-Bir de Constantine, et ce, en l'absence du moindre agent ou employé de l'établissement. Par ailleurs, un autre drame s'est déroulé le 6 juin dans le service maternité de CHU de Constantine provoquant émoi et consternation des internautes après la publication, également ce jeudi, d'une lettre de la sœur d'Imène, une parturiente âgée d'une trentaine d'années et décédée trois jours après son accouchement de deux jumeaux dans des circonstances affligeantes dans la maternité de l'hôpital. Selon son témoignage la défunte aurait été "victime d'un choc septique causé par une très mauvaise prise en charge de la part des médecins". "Après l'accouchement, ma sœur a été abandonnée à son sort", dira-t-elle en pointant du doigt le personnel du service qui aurait agi de la sorte après avoir soupçonné la parturiente d'être porteuse du virus de la Covid-19. Ce que confirme formellement le médecin de garde présent au moment des faits qui affirme que la défunte était atteinte du coronavirus alors qu'elle n'a subi aucun test en ce sens, selon sa sœur. "L'accouchement s'est déroulé dans les meilleures conditions. La parturiente est restée le temps nécessaire de sécurité comme toute patiente mais dans la salle d'isolement affectée aux malades de la Covid-19. La défunte est morte 3 jours après son accouchement non pas à la maternité mais au service de réanimation dédié à la Covid-19, par son infection du virus", témoigne-t-il.