Le parti, enlisé dans une crise depuis des années, a enfin une direction. Une nouvelle ère s'ouvre devant le plus vieux parti de l'opposition dont la direction remportée par la liste Belahcel compte rappeler les anciennes figures exclues ou marginalisées. Il s'en est fallu de peu pour que la sérénité qui a marqué les travaux du congrès extraordinaire du FFS hier à Zéralda ne se termine en queue de poisson. Et pour cause : la présence de deux agents de sécurité lors du dépouillement. Une présence qui n'a pas été du goût de certains congressistes. "On n'est pas au congrès du FLN, ici c'est le FFS. Ce sont les représentants des deux listes (qui se disputent l'instance présidentielle) qui doivent assister l'huissier de justice", peste l'avocate Nabila Smaïl. "Ce n'est pas un congrès de l'administration, c'est un congrès des militants", vocifère-t-elle encore avant que sa demande, après quelques échanges tendus avec certains militants, ne soit satisfaite. Pourtant, jusqu'à cet incident minime, du reste vite contenu, tout se déroulait dans une sérénité totale. Les retrouvailles étaient chaleureuses pour nombre de militants qui ne se sont pas revus depuis plus d'une année. Il y avait bien entendu l'absence d'Ali Laskri et de Mohand-Amokrane Chérifi, mais d'autres figures étaient présentes : c'est le cas notamment d'Aziz et de Karim Baloul que leurs contempteurs cataloguaient de faire partie du "cabinet noir" du parti ou encore de Chafâa Bouiche, d'Abdelmalek Bouchafa, et des deux P/APW de Béjaïa et de Tizi Ouzou, Mehenna Haddadou et Youcef Aouchiche. C'est aux cris de "Si l'Hocine (Aït Ahmed, ndlr) mazalna mouâaridhine" (Nous demeurons des opposants) et dont des portraits géants ornaient l'enceinte que le congrès extraordinaire s'est ouvert la matinée sous le chapiteau de l'hôtel Mazafran, celui-là même qui avait abrité la conférence de l'opposition en 2014. Malgré des consignes strictes, les mesures barrières étaient rarement respectées. Sous le slogan "Pour un consensus national" et "Pour un sixième congrès réassembleur", l'ex-premier secrétaire Mohamed Nebbou, responsable de la commission de préparation du congrès, dévoile le programme qui s'articule en fait autour d'un seul point : élection de l'instance présidentielle qui devrait gérer le mandat de transition d'ici au congrès ordinaire prévu dans une année. Et clore, par ricochet, la crise qui minait le parti depuis deux ans. Deux listes étaient en compétition : celle conduite par Hakim Belahcel, de la fédération de Boumerdès, composée de Brahim Méziani de la fédération de Béjaïa, de Soufiane Chioukh de la fédération de Constantine, de Hadji M'hammed de la fédération de Chlef, et de Noura Touahri de la fédération d'Alger et celle conduite par l'ex-premier secrétaire, Ahmed Djedaï de la fédération d'Alger, composée d'Ikhlef Bouaïchi de la fédération de Béjaïa, de Noureddine Berkaine de la fédération de Tizi Ouzou, de Semmache Kamal de la fédération de Sétif, et de Nadia Ihedadène de la fédération de Boumerdès. Même si le suspense a régné jusqu'au bout, c'est finalement la liste de Hakim Belahcel qui a eu les faveurs des congressistes, avec pas moins de 182 voix favorables sur 325 exprimées. Une victoire somme toute logique pour un homme qui semble faire consensus et réputé pour sa sagesse. Il se voit ainsi renforcé dans son pouvoir même si sa mission de rassembler la grande famille du FFS s'annonce laborieuse. "C'est une nouvelle page qui s'ouvre pour le FFS, Si l'Hocine l'a dit : nous faisons partie d'un grand parti qui s'appelle le FFS. Beaucoup de gens oublient qu'on appartient à une même famille qui s'appelle le FFS. Aujourd'hui il n'y a ni vainqueur ni vaincu, c'est le FFS qui a gagné", s'est-il réjoui à l'issue du scrutin. Entouré de ses partisans qui entonnent les fameux slogans du parti, Hakim Belahcel promet de rappeler toutes les anciennes figures du parti qu'il s'est employé à convaincre de revenir à la "maison" voilà maintenant plus d'une année. "On espère qu'on va aller de l'avant avec cette équipe et il n'y aura pas d'exclusion. On va appeler tous les camarades, hormis ceux qui s'en excuseront", promet-il. "J'ai essayé pendant une année de rassembler les anciens, mais beaucoup, très estimés par la base, disent que ce n'est pas le moment et j'espère que cette fois ci, après quelques réticences, il est temps qu'ils reviennent !". Selon lui, l'apport des anciennes figures est à même de redynamiser le parti dans cette conjoncture particulière que traverse le pays. "Le parti a besoin d'eux pour ouvrir une nouvelle page et être sur le terrain avec nous car seuls nous ne pouvons pas faire beaucoup de choses. Ils doivent être avec nous." Maintenant que l'instance présidentielle a été élue, la prochaine étape, c'est la tenue du conseil national qui ne s'est pas réuni depuis plus d'une année. Celui-ci devrait se réunir théoriquement dans une quinzaine de jours. "Cela fait longtemps qu'on ne s'est pas retrouvés. C'est une étape importante. Il va y avoir un point politique important où nous allons donner la vision du parti par rapport à la situation actuelle qui a connu le Hirak. Jusqu'ici, nous étions divisés, nous avions adopté une démarche, les autres la leur, mais on doit se rassembler pour avoir une seule vision, une nouvelle politique du parti qui va nous mener à un congrès rassembleur en présence de tout le monde, sans exception." Karim Kebir