C'est avec plusieurs heures de retard sur l'horaire prévu, faute de caméra de l'ENTV, qu'a débuté la rencontre régionale de l'Organisation nationale des victimes du terrorisme et des ayants droit (ONVTAD) qui se démarque des autres associations de victimes du terrorisme en appuyant fortement le projet de charte pour la réconciliation et la paix. Mais hier, au siège du musée des moudjahidine où se déroulait la rencontre, ce qui frappait le plus l'assistance c'est le profond décalage constaté entre l'appareil de l'organisation et les familles victimes qui avaient fait le déplacement de Sidi Bel-Abbès, Saïda, Mascara, Relizane, Oran, etc. En effet, de tous les témoignages qu'il nous a été permis de recueillir, les victimes du terrorisme se disent pour la paix, mais refusent catégoriquement d'accorder leur pardon aux bourreaux de leurs proches. Ces familles récusent même l'idée de se voir traiter sur un pied d'égalité avec les terroristes et exigent toujours un statut particulier et les droits revenant aux ayants droit des victimes du terrorisme. Le récit émouvant d'une jeune femme de la région de Sidi Bel-Abbès lorsqu'elle nous raconta le cas de son père égorgé en 2004 par des terroristes, son frère handicapé à vie rajouté à ses 5 sœurs et sa mère dont elle assume totalement la charge. “Toute ma famille et moi, éternellement nous ne serons pour la réconciliation, jamais je ne pardonnerai, plus personne ne peut me rendre mon père aujourd'hui. Les terroristes ne changeront pas”. Et d'ajouter : “Qu'on nous accorde les mêmes droits et le même statut que les moudjahidine, nous sommes pareils en tant que victimes !” D'autres participants à la rencontre attendent de l'après-29 septembre une réelle prise en charge de leur cas, des facilités pour accéder aux logements, pour trouver un emploi, un soutien psychologique pour les enfants ; car pour beaucoup touchés dans leur chair, contraints constamment de quitter leur maison et leurs biens, c'est toute la famille qui subit les répercussions de cette souffrance. Alors que le secrétaire général de l'ONVTAD, version contestataire de Mme Flici, ne cessait de clamer que la paix est la seule solution, et que par conséquent il fallait appuyer le projet de la charte pour la réconciliation et la paix, des victimes du terrorisme réclamaient, elles, justice, “que ceux qui ont commis des crimes paient, que les commanditaires soient jugés”, avons-nous encore entendu. M. El-Far, le SG de l'organisation, tentera pour sa part de contenir et de rassurer. “Nous demandons une prise en charge des familles victimes du terrorisme, nous demandons un statut particulier, mais la paix est la seule voie pour qu'il n'y ait plus de victimes”. Les familles victimes du terrorisme s'en retourneront seules à la fin de la rencontre, seules face à leur douleur, face aux difficultés de devoir continuer à vivre. F. Boumediène