Sous son règne, le Koweït a joué le rôle de médiateur dans une dizaine de conflits régionaux. S'il est souvent cité dans son pays pour ses qualités humaines, son altruisme et sa modestie, l'émir du Koweït, Sabah al-Ahmad al-Sabah, décédé mardi à l'âge de 91 ans, était considéré à l'extérieur comme une des figures marquantes des relations internationales. Diplomate chevronné au long cours, l'Emir du Golfe a brillé dans le concert des nations avec son tempérament d'homme calme, sage et médiateur apprécié à travers notamment une approche apaisée et pragmatique de la diplomatie. Le Koweït sous son règne a joué au médiateur dans une dizaine de conflits dans la région et dans le monde arabo-musulman de manière générale. C'est que cet homme d'Etat, avant son accession à la plus haute fonction du pouvoir en 2006, a officié en tant que ministre des Affaires étrangères pendant 40 ans (de 1963 à 2003). Quatre décennies durant lesquelles Al-Sabah s'est patiemment forgé une approche novatrice de la diplomatie et qui a fini par donner au petit Etat richissime du Golfe, le surnom de facilitateur ou de faiseur de paix. En témoigne l'hommage du chef de l'ONU, Antonio Guterres qui a salué la mémoire d'un homme exceptionnel. "Je suis profondément ému par l'information que je viens de recevoir concernant le décès de Son Altesse l'émir du Koweït. L'émir du Koweït était un extraordinaire symbole de sagesse et de générosité, un messager de paix, un constructeur de ponts", a-t-il déclaré aux journalistes, en apprenant la nouvelle du décès de l'Emir du Koweït. Avec sa disparition, c'est toutes les monarchies du Golfe qui viennent en effet de perdre un influent négociateur. Il était le dernier architecte des relations internationales de la région, après le décès en janvier dernier, d'une autre grande figure de la diplomatie, le Sultan Qabous d'Oman en l'occurrence. Facilitateur Dans une région marquée par des soubresauts et des tensions récurrentes le Cheikh koweitien a joué un rôle de premier plan dans le maintien des équilibres. Durant le conflit yéménite des années 1960, il a servi de médiateur habile et faisant montre d'un équilibrisme sans pareil pour le dénouement de cette crise. En 1968, les bons offices du Koweït ont été déterminants également en vue de parvenir à un règlement pacifique entre l'Arabie saoudite et l'Egypte. En 1982, Al-Sabah a également servi de médiateur entre l'Arabie saoudite et la Libye. Il avait en outre joué un rôle important dans les conflits opposant l'Iran aux autres pays de la région ou encore durant la guerre civile libanaise, dans les années 1980. A l'international, il se distingue par son soutien éclatant et indéfectible aux Palestiniens. Il a fait de cette question une de ses causes arabes prioritaires. Avec son savoir-faire il réussit aussi un tour de force remarquable dans la désescalade entre les principaux pays du Golfe où la tension était montée à son paroxysme en 2017, dans la crise opposant le Qatar à l'Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis et à plusieurs autres pays musulmans. En prenant en main ce dossier brulant, le Cheikh Sabah s'est distingué en réussissant à apaiser les tensions et à convaincre les parties en conflits à privilégier la voie du dialogue et des négociations pour mettre à plat les affaires litigieuses de la région. Son alliance historique avec les Etats-Unis et de l'Arabie Saoudite ne l'empêcheront pas à entretenir par ailleurs une relation apaisée avec Téhéran, pourtant extrêmement hostile à Washington et à Riyad, les deux alliés historiques du Koweït. Après l'annonce de son décès, Téhéran a d'ailleurs salué « la modération et l'aplomb » du défunt. Dans un Yémen dévasté par la récente guerre depuis 2014, le défunt émir du Koweït n'a pas cessé de peser de tout son poids pour le rétablissement de la paix. Le ministre des Affaires étrangères Mohammed al-Hadhrami, a présenté ses « sincères condoléances aux frères au Koweït ». Et le porte-parole des rebelles Mohammed Abdelsalam a affirmé que les Houthis « n'oublieraient jamais le rôle (de l'émir) en faveur des négociations de paix (...) ni son amour pour le Yémen ». Homme d'Etat libéral, il a initié dans son pays, de réformes économiques et sociales ambitieuses permettant une stabilité aujourd'hui jalousée dans toute la région.