Saïd Barbari, P/APC de Djemorah (wilaya de Biskra), salue le rôle joué par les associations et la société civile dans la lutte contre la Covid-19, tout en déplorant le manque de prérogatives dont souffrent les élus qui, en plus, ne disposent pas de grands moyens financiers leur permettant d'agir en conséquence. Liberté : Comment votre commune a-t-elle fait face au coronavirus ? Saïd Barbari : Faut-il de prime abord préciser que nous étions, pendant de longues semaines, épargnés par la pandémie de coronavirus qui a frappé quasiment toute la wilaya de Biskra. Aucun cas n'a été signalé sur l'ensemble de notre commune depuis que l'alerte du premier cas a été donnée, jusqu'à ce que le coronavirus ait connu une propagation alarmante, nous étions toujours loin de la pandémie. Malheusement, vu l'inconscience, l'irresponsabilité et l'incivisme de certains, le scénario vécu dans des régions considérées comme foyers du coronavirus a failli se reproduire chez nous. Mais nous avons pu éviter le pire en prenant les dispositions indispensables. C'est au début du mois d'août que nous avons, en coordination avec les services de la santé, pris des mesures urgentes pour pouvoir plus ou moins limiter la propagation du virus. Pour désengorger l'établissement sanitaire où le personnel soignant est toujours sur le qui-vive, nous avons aménagé le siège du FLN jouxtant l'établissement en question en centre de tri Covid accueillant les cas suspects. Ceux testés positifs et présentant des complications de leur état de santé ont été évacués à l'hôpital central du chef-lieu de wilaya où les soins nécessaires leur ont été prodigués. La plupart ont quitté l'hôpital sains et saufs. Nous déplorons toutefois un nombre de décès, lesquels se comptent sur les doigts d'une seule main. Simultanément à la gestion des affaires courantes des habitants de la commune estimés à plus de 18 000, les élus locaux, toutes tendances politiques comprises, se sont consacrés avec beaucoup d'abnégation à la lutte contre la pandémie. Ainsi, tous les moyens appropriés dont dispose notre commune, bien que maigres, ont été mobilisés et mis à la disposition de nos équipes, lesquelles ont mené à bien des campagnes de sensibilisation, de stérilisation et de désinfection touchant tous les quartiers de la localité, opération qui se poursuit toujours et à laquelle la société civile a pris part. Je pourrais dire que grâce aux efforts consentis des uns et des autres, la situation est maintenant bel et bien maîtrisée. Les citoyens de votre commune se sont-ils impliqués dans la lutte contre le coronavirus et quel a été leur rôle ? Naturellement, les acteurs de la société civile n'ont pas été indifférents. Les nombreuses associations à caractère culturel et caritatif présentes en ville se sont toutes engagées dans la lutte contre la pandémie, chacune à son niveau et avec les moyens du bord. Elles sont encore à pied d'œuvre avec nos équipes, menant des campagnes de sensibilisation à la maladie. Beaucoup de jeunes se sont eux aussi constitués en associations de bienfaisance soutenant les familles impactées par la crise sanitaire. Ils leur distribuaient des colis alimentaires, pour ne citer que cet exemple. En coordination avec ces associations, l'APC a contribué à la confection d'équipements de prévention et de protection contre le coronavirus, notamment les masques dont on a fourni des centaines, particulièrement au personnel médical et paramédical. Les responsables des unités productives implantées à Djemorah, Guedila et Cilas en l'occurrence, se sont eux aussi impliqués dans l'opération de lutte. L'APC tient à leur adresser ses remerciements, notamment à M. Hougui qui s'est engagé volontiers à fournir tous les équipements nécessaires à l'unité Covid mise en place à côté de la structure hospitalière. Nous ne pouvons, dans ce contexte, oublier le rôle incontournable joué par les équipes médicales, je cite Meriem Douffi et Sami Laouar, ces jeunes soignants qui sillonnaient la ville afin de dispenser à titre bénévole des soins médicaux aux patients confinés à domicile. La pandémie a révélé des failles en matière de gestion de la situation de crise au niveau local. Faut-il, à la faveur de cette crise, revoir le statut de la commune ? Nonobstant les efforts consentis dans le cadre de l'amélioration du cadre de vie de nos citoyens, nous, les élus locaux, sommes à la longue pointés d'un doigt accusateur. On nous impute la responsabilité de tout ce qui va mal, alors que les prérogatives qui nous sont confiées sont très limitées et ne nous permettent pas non plus d'agir en toute liberté de façon à rendre meilleur le vécu du citoyen. L'on ne peut rien face à de telles restrictions, notamment quand on est une commune dépourvue de grosses sources de financement, comme c'est le cas pour certaines communes environnantes, et tout ce que l'on entame est budgétivore. Pour pouvoir répondre au mieux aux besoins incessants des habitants, il faut surtout disposer de gros moyens financiers ainsi que de larges prérogatives, et c'est ce qui fait défaut à l'heure actuelle. L'on aimerait que soit revu ce code communal qui limite toujours notre champ d'intervention. Comment envisagez-vous le devenir de votre commune après la pandémie ? Œuvrer de façon à rendre moins virulents les effets bouleversants de la pandémie de coronavirus lors de la période du déconfinement total est une des missions les plus importantes de l'APC. Cependant, ce que l'on ambitionne de faire au bénéfice des personnes et familles touchées est toujours tributaire de la disponibilité des moyens. Nous ne pourrons pas le faire comme il se doit, compte tenu de l'état actuel de notre situation financière qui n'est toujours pas très bonne.